Fasciné depuis tout jeune par la figure mythique de Robin Hood, le comédien Russell Crowe s'intéressera logiquement de très près au projet Notthingam, faisant du shérif le véritable héros de l'histoire face à un hors-la-loi bien plus trouble. Le scénario initial de Cyrus Voris et Ethan Reiff peinant à convaincre la star (également productrice), Brian Helgeland est appelé pour revoir la copie et proposer un traitement plus satisfaisant (il fut un temps envisagé que Crowe interprète à la fois les deux ennemis), avant que ce dernier ne voit à son tour son travail remanié par Paul Webb, puis par Tom Stoppard.
Peu étonnant dès lors que l'on ne retrouve plus rien des intentions de départ dans le produit fini, renommé simplement Robin Hood sous la direction de Ridley Scott, qui n'attendait que cette occasion pour retâter du Moyen-Age après son expérience sur Kingdom of Heaven, fresque dont il envisageait à une époque un prolongement.
Voulant à tout prix coller à une certaine réalité historique (ce qui n'empêchera pas une poignée d'anachronismes), le film de Ridley Scott fait donc le choix de s'attarder sur les évènements précédant la montée en puissance du héros redresseur de torts, et de dévoiler ce qui l'aura poussé à devenir le Robin Hood que nous connaissons tous. Un choix malheureusement typique d'une époque où Hollywood se sent obligé de tout expliquer, de revenir sur les origines de personnages populaires dont on préférerait franchement en savoir le moins possible.
Car à privilégier une approche réaliste et terre-à-terre, Ridley Scott et ses scénaristes finissent par banaliser le mythe, par passer complètement à côté de ce qui faisait justement l'attrait de cette légende. Au mystère, à l'émotion, à l'aventure et à l'exaltation, ce nouveau Robin Hood préfère donc un récit cousu de fil blanc, cherchant absolument à mêler contexte historique, romance et origin story.
Malheureusement, le scénario ne fonctionne sur aucun point, ne décolle jamais, endort son audience avec ses personnages caricaturaux et son rythme mollasson. Si le regard critique sur les croisades est prometteur (bien que déjà abordé dans Kingdom of Heaven) et apporte effectivement un contexte historique, social et politique, le reste ne cherche plus à raconter quoi que ce soit, se contentant d'aligner quelques séquences relativement spectaculaires et d'expédier bien rapidement la prise de conscience du héros.
Aussi endormi que le spectateur, Ridley Scott laisse le soin à son équipe d'offrir un cadre effectivement soigné à base de décors majestueux et de superbes costumes, ne déployant de son côté qu'une mise en scène impersonnelle et sans envergure, un comble pour un tel cinéaste qui aura pratiquement toujours réussi à sauver du naufrage ses travaux les plus contestables par une tenue formelle impeccable.
Prestigieux sur le papier, le casting quatre étoiles peine aussi à faire des étincelles, chacun livrant une prestation certes professionnelle mais jamais mémorable, l'écriture s'avérant d'une pauvreté affligeante. Seul peut-être Mark Strong parvient à tirer son épingle du jeu face à ses camarades plus ou moins éteints, à commencer par un Russell Crowe physiquement impliqué mais en pilotage automatique.
Visuellement satisfaisant grâce à l'équipe technique, Robin Hood reste cependant un sacré pétard mouillé, transformant un personnage mythique et fascinant en énième Spartacus du pauvre. Une tentative ratée et interminable, ennuyeuse et désincarnée, qui aurait sûrement gagnée à s'en tenir aux intentions initiales, bien plus bandantes.