Gareth Edwards réalise un véritable tour de force !

Beaucoup de spectateurs, et en particulier les fans, s’étaient montrés assez réticents envers ce Rogue One. À cause de son statut de spin-off, qui renforce son rang de « pur produit commercial » et « d’amuse-bouche » au très attendu Épisode VIII ? Entre autre ! Mais ce sont surtout les nombreux reshoots commandés par Disney, ayant fait le buzz l’été dernier, qui ont provoqué le doute chez le public, s’attendant pour le coup à un long-métrage monté maladroitement. À un projet non terminé, saccagé par le studio façon Suicide Squad. Que tout le monde se rassure : Rogue One respecte amplement son cahier des charges avec énormément de savoir-faire, au point d’être le meilleur divertissement de cette année 2016. Il se présente même – et là, chapeau bas, M. Gareth Edwards ! – comme l’un des meilleurs opus d’une franchise décidément indémodable et intemporelle. Un véritable tour de force !


Bien que J.J. Abrams et son Réveil de la Force ait ouvert la marche avec brio l’année dernière, Edwards et son équipe n’ont pas eu la tâche facile avec Rogue One. En effet, au lieu d’emmener la saga dans une toute nouvelle direction, ils ont dû l’étendre avec une histoire certes inédite mais devant s’implanter en elle. Devenant pour le coup des proies faciles aux incohérences scénaristiques fréquentes dans ce genre de projet (comme peut en témoigner la franchise X-Men) et au poids de l’intrigue principale (les situations et personnages cultes ayant suffisamment d’envergure pour vampiriser les nouveautés). Vous l’aurez compris : ce spin-off partait avec un sérieux handicap dès sa mise en chantier ! Mais à partir d’un script destiné à la base pour une série TV (à l’époque où George Lucas tenait encore les rênes), Gareth Edwards et sa bande de scénaristes ont su tirer la franchise au-delà des étoiles !


Bien évidemment, l’ensemble se montre classique, comme tout bon Star Wars qui se respecte ! Par exemple, faut-il rappeler que le tout premier opus (l’Épisode IV) était un compte de fée, dans lequel le gentil chevalier blanc devait sauver la princesse des griffes du chevalier noir ? Les plus sceptiques crieront une nouvelle fois au « déjà-vu ». Mais ce qui fait la puissance des intrigues Star Wars, c’est leur universalité, et Rogue One ne déroge pas à la règle ! D’autant plus que le long-métrage propose une intrigue véritablement captivante, faisant entrer la franchise dans le film d’infiltration et de casse façon Les Douze Salopards (référence assumée par l’équipe), ce qui apporte un vent de fraîcheur bienvenu dans la saga. Le tout en proposant des personnages charismatiques au possible (aussi bien les principaux que les secondaires), superbement interprétés et à la destinée inattendue dans ce genre de production, des situations palpitantes et ce qu’il faut de morceaux de bravoures pour capter l’attention du public. Cerise sur le gâteau : Rogue One s’incruste admirablement bien à la franchise grâce à son intrigue tenant la route et des caméos savoureux qui ne tombent jamais dans la gratuité (Dark Vador n’est pas le seul invité !);


Le spin-off se démarque également de la saga principale par le ton qu’il aborde pendant ses 133 minutes. Bien loin de la légèreté des opus précédents et de l’humour qui leur sont si cher (allant de la débilité de Jar Jar Binks aux frasques ravageuses de Han Solo) et d’un côté parfois enfantin, Rogue One affiche un sérieux et un aspect sombre de bout en bout, lui donnant une toute autre envergure (même si L’Empire contre-attaque, La Revanche des Sith et Le Réveil de la Force avaient déjà offert une ambiance ténébreuse à souhait). Si bien que l’intrigue nous parait bien plus dramatique et puissante qu’à l’accoutumée, nous livrant des séquences déchirantes et des situations marquantes. Au point que le sort des personnages intéresse au plus haut point. Attention, vous aurez tout de même droit à du comique via le droïde K-2SO ! Mais juste en quantité suffisante pour ne jamais interférer avec l’ambiance de l’ensemble. Malheureusement, c’est à ce niveau que les fameux reshoots commandés par Disney se ressentent un peu. Le studio ayant jugé le projet bien trop sombre pour le marketing qui s’ensuivait (trouvant le tout inadapté au jeune public), quelques scènes ont été refaites pour adoucir l’ensemble. Et, avec certains passages niaiseux, aux répliques téléphonées et à l’aspect trop hollywoodien (mise en scène et musique trop appuyées), autant dire que le ton du film s’effrite à certains moments…l’espace de quelques secondes, fort heureusement !


Mais là où Rogue One tire toute sa force, c’est dans la mise en scène de Gareth Edwards. Si le bonhomme avait déjà su montrer tout son savoir-faire avec un film indépendant (Monsters) et un blockbuster d’envergure (Godzilla), il pousse le bouchon encore plus loin ! D’une part, il use à merveille d’une qualité technique indéniable qui permet de donner corps comme jamais à l’univers Star Wars : des effets spéciaux dantesques (très bonne alliance entre le numérique et le « fait main » comme les animatroniques et les maquillages), des décors naturels de toute beauté qui renforcent le côté « découverte » propre à la franchise, des musiques sachant emporter le spectateur (Michael Giacchino confirme sa succession à John Williams après Super 8 et Jurassic World)… Et de l’autre, le réalisateur donne à son film une vie, une énergie jusque-là jamais vue dans un film Star Wars. En collant au plus près des comédiens comme il a l’habitude de faire, Edwards nous offre des séquences viscérales à souhait. Tout en se permettant de sublimes plans panoramiques afin de faire profiter des paysages.


Dit comme ça, il est vrai que cela peut paraître anecdotique. Pourtant, c’est avec ce genre de talent qu’un film peut faire toute la différence. Car avec Rogue One et le travail d’orfèvre de Gareth Edwards, un TR-TT (les tanks quadrupèdes de l’Empire) n’a jamais paru aussi lourd et imposant à l’écran. Une bataille spatiale a rarement été aussi endiablée que dans ce final d’exception. Un personnage culte n’a pas été iconisé avec autant de classe et d’ampleur par le passé (Vador a droit à une scène d’anthologie tout simplement extraordinaire). Des décors de petits vaisseaux se révèlent pour la première fois claustrophobes au possible. Jamais des plans de destructions, qu’elles soient apocalyptiques (celle sur la planète Jedha) ou bien salvatrices (le final), ont eu autant d’impact émotionnel que dans ce long-métrage. Vous l’aurez compris, Rogue One ne manque pas d’exemples ! Mais au lieu de les lister un par un, il ne vous reste qu’une seule chose à faire : aller voir le film, car rarement un blockbuster, qu’il appartienne ou non à la franchise Star Wars, n’a été aussi poignant, spectaculaire et majestueux ces dernières années que ce Rogue One.


Malgré quelques sceptiques l’ayant accusé de s’accrocher un peu trop à la trilogie originale (allant même jusqu’à crier au remake), J.J. Abrams avait su perpétuer l’héritage Star Wars afin de l’amener vers de nouvelles galaxies. Gareth Edwards, lui, enrichit la saga non pas d’une banale histoire secondaire mais plutôt d’un divertissement d’exception. Un opus sur le papier « à part » qui arrive pourtant à faire de l’ombre à la majorité des épisodes principaux, grâce au talent de son réalisateur et de son équipe. Un amuse-bouche au huitième opus ? Rogue One s’annonce désormais bien plus comme un handicap pour le long-métrage de Rian Johnson, qui aura fort à faire pour se démarquer à son tour. Mais vu que le cinéaste de Looper n’a pas non plus à rougir de son savoir-faire, autant dire que la Force est déjà de son côté !


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le 14 déc. 2016

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