Roma
7.1
Roma

Film de Alfonso Cuarón (2018)

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Je comprend tout à fait que Roma ait tapé dans l'oeil des américains au point de remporter trois Oscars en 2019, à savoir meilleur film étranger, meilleure réalisation et meilleure photographie. C'est une fresque surprenante que dresse Alfonso Cuaron, techniquement peaufinée et esthétiquement parfaite. Reconstitution d'un quartier de Mexico dans les années 70, servie par un noir et blanc sublime et léché, Roma tire sa force de ses contrastes : l'intimité des personnages confronté à la grandeur des paysages arides, portraits de femmes et lutte des classes, sauver une vie et en perdre une autre... Le temps semble être comme suspendu à plusieurs reprises, avec de longs plans-séquences d'une fluidité rare mais étrangement séduisants aussi. Je ne sais pas si ma télé était mal réglée mais j'ai été étonné par la qualité du son, comme si le réalisateur avait fait le choix de ne pas le traficoter pour en garder que l'essence. Ce portrait doux et amer ne force aucun trait, aucune émotion et laisse le spectateur contempler et deviner l'histoire. D'un côté, on a la décomposition de cette famille aisée qui s'effectue de façon très intrigante, sans qu'on puisse en déceler les causes. Et de l'autre, on a le regard de cette domestique, fidèle et discrète, qui tombe accidentellement enceinte. La mise en scène de Alfonso Cuaron est en cela fascinante car elle conjugue subtilement ces deux mondes, délivrant une densité de détails et des images absolument sublimes. Mais j'ai trouvé que le jeu des acteurs, bizarrement, ne s'accordait pas à cette forme très graphique. Il y a des scènes splendides, émotionnellement déconcertantes, mais qui se prêtent davantage à la situation représentée qu'à la performance des acteurs. On ne les voit presque jamais en gros plan, ils participent toujours à la composition picturale de chaque scène mais sans que leurs émotions soient au coeur du récit. En cela, je considère la nomination des deux actrices aux Oscars, Yalitza Aparicio et Marina de Tavira, sur-estimée et donnée. Personnellement, je n'ai pas ressenti grand chose et j'attendais peut-être plus un juste équilibre entre l'émotion du scénario et ce parti pris visuel si tranchée. En fait, l'effet que m'a fait Roma, c'est un peu comme si j'étais au musée devant une très belle oeuvre... Mais ce qui est certain, c'est que Alfonso Cuaron nous surprend une nouvelle fois en nous égarant dans un genre et un style qu'on aurait pas soupçonné en connaissant ses précédents films.

alsacienparisien
7

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Créée

le 2 mai 2020

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