En écoutant les gens parler dans la file avant la séance, on peut distinguer 2 types de spectateurs. Il y a les avertis, échangeant des "ouais c'est le nouveau film de Mr Oizo, y paraît qu'il y a Gaspard de Justice dedans en plus", et puis il y a des plus hasardeux, expliquant leur présence par "j'ai regardé le teaser, j'ai vu un pneu avancer tout seul..."
En fait, on est tous venus voir du WTF, de l'absurde, de l'insensé. Et on a été servis. C'est à la fois tordu comme pas possible et bête à manger du foin. Un bon gros trip de Mr Oizo. Mais là où un simple trip ne mériterait qu'un court métrage, Rubber mérite son heure et demi. Parce qu'au-delà de l'histoire d'un pneu psychopathe et parano, Quentin Dupieux s'inscrit dans la plus pure tradition de l'art absurde, le vrai, le profond. Et qui oserait dire que Ionesco était un imbécile? Rubber, c'est une méditation sur le useless et le meaningless de la vie, une ode au "no reason" qui nous entoure sans qu'on s'en rende forcément compte. On notera une mise en abyme aussi complexe que la vie elle-même: un film qui n'en est pas vraiment un dans un film qui est plutôt un non-film, ça fait pas mal cogiter pour un bout de caoutchouc.
Le tout est servi par un cadrage intelligemment hasardeux, des images finalement chouettes, et surtout une BO digne de ce qu'on pouvait attendre de ses auteurs, à savoir Mr Oizo himself et son pote Gaspard de Justice.
Bref. Vous devez voir ce film. Pourquoi? "No reason"...