Derrière un scénario qui donne à fond dans le cliché du retournement de situation perpétuel, se cache une pépite de Johnnie To. Comme dans beaucoup de ses films, c'est la désinvolture de son personnage principal (Lau Ching Wan, excellent), policier surdoué et désœuvré suite à sa mise au placard, qui triomphe du hiératisme de ses opposants (des mafieux lambda).
Les deux camps sont manipulés par un superbe Andy Lau, qui incarne un personnage entre deux eaux n'ayant rien à perdre et se foutant de la gueule de tout le monde à grands coups de bluffs insensés et de déguisements improbables.
L'humour constant et le ton caustique de l'ensemble (la course-poursuite cahin-caha entre les deux héros, sonnés par une explosion, sous une musique épique disproportionnée) tranchent avec le nihilisme du propos, cristallisé par le personnage de Lau, qui se sait mourant. Quelques scènes réellement belles (dans le bus notamment) rehaussent le tout, sans jamais faire baisser le rythme effréné imposé par la course contre le temps de Lau.
Celui-ci se présente d'ailleurs comme un miroir du metteur en scène, avouant mener son comparse en bateau - lequel de son côté admet à demi-mot aimer cela. La mise en scène est... parfaite, comme souvent avec To, malgré quelques effets d'accéléré / ralenti disgracieux, mais qui restent néanmoins cohérents avec la situation de Lau - cadavre en devenir pour qui l'on peut supposer que le temps s’écoule différemment.
Le final est peut-être de trop, opérant un ultime retournement quelque peu superflu, mais ce qui reste en tête après le visionnage, c'est bien l'ambiance bleu nuit du film, et la peinture remarquable des relations entre les différents protagonistes du film.