Rush
7.2
Rush

Film de Ron Howard (2013)

C'est l'histoire de deux monstres ultra charismatiques du sport automobile aux fantastiques parcours parallèles où la réalité dépasse allègrement la fiction. Même en n'y connaissant rien ou presque, il y a du plaisir à suivre ces deux compétiteurs antagonistes qui ont fait l'histoire de l'âge d'or de la F1. Daniel Brühl est un parfait sosie de Niki Lauda et incarne superbement sa volonté de fer. Chris Hemsworth colle bien au rôle de James Hunt même s'il peut aussi bien passer pour n'importe quel sosie de Thor avec une micro-dose de nuances en plus. Le budget bétonné permet une reconstitution charmeuse de la période à même de faire rêver tout amateur. La dernière partie est assez émouvante et Ronnie parvient à véhiculer un beau duel en course à Nürburgring et Fuji 1976 tout en pointant les motivations aussi bien que les risques insensés pris par ces bêtes de course nées pour la compétition.

Bref, il était presque impossible de faire un mauvais film avec deux parcours aussi incroyables et Niki Lauda lui-même en consultant. Mais franchement, est-ce que les gens vivent et se parlent comme ça dans la vie ? Ce ne sont pas des dialogues mais un concours de phrases fortes limite : "vous faites vos pièces en magnésium ?"... Non ? Ah bah, voilà, vous êtes cons, je suis intelligent. Scène terminée... On a l'impression d'assister à un résumé wikipédia avec toutes les grandes étapes collées les unes à la suite des autres oubliant volontairement les détails anodins qui font la vie, où toute scène est commodément gommée de la moindre ambiguïté pour n'être qu'un moment clé parmi les autres. Faut-il vraiment montrer de bout en bout la rivalité entre ces deux pilotes sans aborder un instant leur véritable amitié, autrement plus profonde que ce qui est montré ici, si ce n'est dans une scène finale juste là pour émouvoir sciemment et quelques signes qui flattent l'égo du spectateur ? (ouais, ils s'aiment bien en fait, ça se voit...)

C'est tellement commode, tellement Ronnie. Tout est lissé pour s'enchaîner sans y réfléchir vraiment. Le mannequin Suzie doit quitter l'écran de télé pour aller bosser, hop, James Hunt a immédiatement un problème de voiture alors que Niki lui roule vers la victoire armé de son amour discret et vrai pour Marlène qui est stable et le soutient pleinement pendant la course. Deux italiens fans de Ferrari se sont fait piloter par Niki, hop, l'anecdote se mêle à la rencontre avec Marlène (très bonne Alexandra Maria Lara) histoire de bien densifier le moindre instant résumé. C'est sans arrêt raccourci au plus rapide. Il y a de bons moments et de superbes héros de course mais tellement de fois, je me suis dit, c'est tellement facile, tellement unidirectionnel, tellement gros sabots. Lauda n'a certainement pas récupéré ses facultés en un tour de piste, il a dû abandonner à son premier essai.

J'aime bien Ron Howard mais c'est de plus en plus dur pour moi de vivre ses films naïvement sans être gêné par sa mise en scène surlignant les faits importants et délaissant la profondeur des personnages pour n'en garder que les grandes lignes imagées :
- Bonjour, je suis James Hunt, je suis un connard arrogant mais je suis un pilote de folie, j'aime la teuf et je baise quand je veux même si je ne contrôle pas grand chose.
- Bonjour, Je suis Niki Lauda, je suis un connard arrogant mais je suis un fin stratège, un formidable préparateur et j'ai le contrôle de ma vie parce que je calcule tout et évite les excès.
James est une tête brûlée et se lève la tête dans le cul. Niki est pragmatique et discipliné. 10 fois, 20 fois, 40 fois c'est surligné comme s'il n'y avait rien d'autre à dire.

Évidemment, c'est tout de même un des meilleurs films à gros budget sur le sujet. Forcément, si les concurrents s'appellent Driven, Michel Vaillant et Thunderbolt aussi... Le biopic est assez fidèle à la réalité par certains côtés. Mais bon : http://silodrome.com/james-hunt-vs-niki-lauda-historic-clash-of-the-titans/ Dites moi que vous ne comprenez pas plus clairement qui sont Niki et James avec ce doc plutôt qu'avec ce film qui n'a pour seul sujet que la dualité, que les deux pilotes n'ont pas l'air un peu plus sympathiques et surtout multidimensionnels, qu'ils n'ont pas l'air aussi seuls dans leur trip que dans le film mais réellement entourés d'êtres vivants aussi importants et passionnés qu'eux.

Je vais éviter de renchérir sur le fait que hormis les deux dernières, les courses sont pour la plupart expédiées en quelques secondes et que la caméra épileptique trop serrée pendant l'action sape une bonne partie de l'intensité et fait qu'une course ressemble souvent à l'autre et n'a que peu de sens tout court, au risque de me faire tuer tout de suite...

C'est dommage, Daniel Brühl est vraiment terrible et Alexandra Maria Lara n'est pas en reste mais au final, ce n'est qu'un minimum vus les parcours extraordinaires de ces deux pilotes. Je pourrais mettre 6 sans problème mais j'ai eu trop de fois des envies de 4 et même de 3 pour laisser couler.
(flying tomatoes)

ps : et puis, on ne cache pas non plus le film pour bourrin de l'auto où il y a de l'extase sur des gros moteurs (ce que toutes les femmes détestent bien entendu...) ce dont je me fiche éperdument.
drélium
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste °Chroniques du gras quotidien

Créée

le 12 juin 2014

Critique lue 2K fois

37 j'aime

6 commentaires

drélium

Écrit par

Critique lue 2K fois

37
6

D'autres avis sur Rush

Rush
Eren
9

Dans le cockpit d'une Formule 1, l'épée de Damoclès n'est jamais loin.

Pas plus tard qu'hier, Rush résonnait dans ma tête comme l'énergie déchaînée d'un bon vieux morceau qui groove. L'existence de ce projet filmique ne m'était pas non plus familier, autant dire que ce...

Par

le 29 sept. 2013

88 j'aime

9

Rush
Gothic
8

Tyrrell et baron du feu

C’est un Ron Howard en roue libre et très inspiré qui signe ici ce film en bel hommage à la rivalité historique entre James Hunt et Niki Lauda. D’un côté, un pilote issu d’un milieu plutôt modeste...

le 28 janv. 2014

67 j'aime

20

Rush
Sergent_Pepper
7

Un pneu, beaucoup, passionnément.

La F1, je maitrise à peu près autant que les règles du Camoulox. Les films de compétition, généralement, j’évite avec autant d’adresse que Lauda slalome entre les carcasses de bagnoles accidentées...

le 9 mars 2014

45 j'aime

1

Du même critique

Edge of Tomorrow
drélium
7

Cruise of War

Personne n'y croyait mais il est cool ce film ! Dingue ! On aurait juré voir la bouse arriver à 100 bornes et voilà que c'est la bise fraîche ! Doug Liman reprend pourtant le concept de "Un jour sans...

le 23 juin 2014

202 j'aime

31

World War Z
drélium
2

Brade pire.

Misérable. Pire film de zombies. Je m'attendais à rien et j'ai eu rien. J'ai même eu plus que rien, ou plutôt moins que rien. Il n'y a rien. Les seules scènes valables sont les trois moments...

le 5 juil. 2013

180 j'aime

66

Requiem pour un massacre
drélium
10

Va et regarde la guerre

Il y a peut-être un micro poil trop de gros plans de visages pétrifiés qui mettent en évidence un fond légèrement binaire comparé à d'autres œuvres plus ambigües et analytiques. Il n'est pas question...

le 27 avr. 2011

175 j'aime

18