Sailor et Lula est encore l'un des derniers films lumineux de David Lynch, pourtant à deux doigts de sombrer dans la black lodge.
Sailor et Lula forme un couple magique, où l'insouciance et la passion ont pris les commandes.
La mère de Lula est une sorcière (de l'ouest), une infâme créature pleine de rancoeur, de jalousie, de folie, et manipulatrice. N'ayant pu avoir les faveurs de Sailor, elle pose un contrat pour l'assassiner. Prête à toute pour détruire l'idylle de sa fille, après avoir tué son père.
Sailor et Lula conduisent sur la route (en brique jaune), il n'y a que sur la route, en mouvement, qu'ils sont heureux. Partout autour d'eux, le monde se décompose, s'empoisonne. La galerie de personnage est terrifiant, à part Johnnie qui va très mal finir. Mais petit à petit, le joli couple qui semble déjà brûler leurs vies comme ils brûlent leurs cigarettes (importance du feu) se retrouvent rattraper par la dégénérescence du monde. Ils entendent des drames à la radio, plutôt que la musique rock habituelle, puis sont témoins d'un accident de la route. Et là tout bascule. Une jeune femme meurt sous leurs yeux. Lula est traumatisée. Ils s'arrêtent dans un hôtel et Lula vomit, une tache odorante qui sera sans cesse convoqué par différent personnage, signe d'une contamination de leur bonheur. C'est aussi le signe de l'espoir, Lula est enceinte. Ils croisent cependant la route d'un démon (de plus), Bobby Peru (comme le pays), qui propose à Sailor de participer à un casse. Mais Bobby a d'autre dessin, tuer Sailor et éventuellement récupérer Lula qu'il traumatise au préalable dans une scène de "viol" sans coït, tout se passe dans les mots et le toucher. Le casse se déroule, Sailor est sur le point de se faire descendre mais grâce à l'intervention de la police, Bobby se fait buter et Sailor finit en taule pendant 6 ans (5 ans et 10 mois). Son fils a le temps de grandir mais Lula, folle d'amour, l'attend. Sailor sort de prison, revoit Lula et rencontre son fils. Mais quelque chose cloche. Sailor considère qu'il n'est pas assez bien pour eux et veut les abandonner. Il quitte la voiture et part, mais en chemin, il rencontre des voyous qui lui casse la figure. A terre Sailor a une vision de la bonne fée qui lui dit : "Ne te détourne pas de l'amour, Sailor". A son réveil Sailor a un déclique, il hurle "Lula" et la rejoint en lui chantant "Love me tender" (réellement interprêté par Cage), une chanson qu'il ne chanterait que pour sa femme.
Fin.
J'ai adoré ce film. C'est fou à quelque point Lynch réussit à nous amener dans un monde de rêve, de fantasme qui soudainement bascule dans la folie et la terreur. Sailor et Lula a tout d'un film rayonnant, deux amants sur les routes, planant sur leurs petits nuages mais il y a toujours cette ombre qui rôde, le Mal, qui contamine tout, jusqu'à nos personnages prinicpaux.
On retrouvera ce motif dans tous les films de Lynch à partir de Blue Velvet. Twin Peaks et the return étant l'apogée de ce concept. La musique a toujours une grande incidence sur l'expérience, car tous les films de Lynch sont une expérience en soi (même Dune).
Une expérience encore lisible dans sa narration et emplie d'amour et d'espoir, à l'image du rouge-gorge dans Blue Velvet. On notera une petite faille au niveau de l'utilisation ou l'utilité de certains personnages, loin de moins l'idée de dénigrer les side-kicks mais, je n'ai pas compris l'utilité de certains personnages comme celui d'Isabella Rosselini.
J'ai par contre adoré toute la symbolique autour du cadre photo que l'on retrouvera dans Twin Peaks et the return, Lula révoquant l'emprise de sa mère en y jetant de l'eau là ou dans The return, par jeu de miroir inversé, La mère Sarah Palmer invoque sa fille et la coince dans une autre dimension en brisant le cadre. Magique. C'est là qu'on voit que Lynch a basculé au fil du temps dans quelques choses de beaucoup plus noirs, plus sombres à moins que ce ne soit, nous, notre monde qui ait plongé dans les ténèbres.