Salaud, on t'aime par abarguillet
Un photographe de guerre à la retraite, Jacques Kaminsky interprété par Johnny Hallyday buriné à souhait, vient visiter avec sa dernière compagne un chalet alpin qu’il entend acheter pour fuir Paris et ses pompes et se retirer à l’écart du monde. La jeune femme ( Sandrine Bonnaire ), qui lui fait visiter les lieux, dégage un charme auquel cet amoureux des femmes ne résistera pas, si bien que nous le retrouvons, quelques mois plus tard, s’installant en sa compagnie dans ce lieu idyllique veillé par un aigle photogénique et un environnement exceptionnel de cimes enneigées. Bientôt le meilleur ami du photographe, un médecin campé par Eddy Mitchell, lui rend visite et voyant combien son ami souffre de ne pouvoir réunir ces quatre filles, nées chacune d’une mère différente et qu’il a coupablement négligées, imagine de leur faire croire que leur père est très malade, ce qui a pour conséquence immédiate de les faire arriver en catastrophe et de créer une suite d’imbroglios plutôt sympathiques. Malheureusement cette chronique familiale va brusquement virer au polar de façon alambiquée, ce qui enlève au film sa cohésion et surtout le prive de toute crédibilité.
Dommage qu’une fois encore Lelouch ait cédé à son travers de faire compliqué alors que la simplicité du début lui seyait autrement mieux et surtout conférait une unité à son film. Mais on ne guérit pas de ses travers. On sait qu’il y a toujours eu chez Lelouch, cet éternel gamin fou de caméra, un petit quelques chose d’amateurisme. Chez lui, les découpages ont trop souvent manqué de nerf et les scénarios de muscle, ce qui les fait partir en vrille comme nous le constatons avec" Salaud, on t’aime".
Heureusement les images sont belles. Lelouch est un œil, pas toujours une tête, ce qui produit des longs métrages bancals comme ce dernier auquel peu de choses suffisait pour emporter l’adhésion. Reste un casting plaisant, un duo composé des deux ténors de la chanson populaire, le joli sourire de Sandrine Bonnaire, des paysages magnifiques et la dose habituelle, que n’oublie jamais Claude Lelouch, de romanesque composite, de rigolades entre copains, de belles échappées, de quelques larmoiements et d’une bordée de lieux communs, le tout servi sur un lit d’images superbes et de tendresse amusée. Toutefois, le cinéaste aurait été mieux inspiré s'il s'était contenté de nous livrer le bilan d’une vie, qui n’est autre que la sienne, teinté de nostalgie, de plaisirs hédonistes et d’inévitables regrets.