Gone boy

Les apparences, tout pour les apparences. Jeune homme d'un milieu modeste, perdu dans un milieu bien plus aisé, le rejetant tel un élément étranger dans un corps humain. Un parasite sous les traits de l'exceptionnel et intrépide Barry Keoghan, illuminant la pellicule par son aura tant magnétique qu'étrange, rappelant ses débuts devant la caméra de Lanthimos. Rarement son regard aura été aussi hypnotique devant la caméra, cette fois-ci devant celle d'une jeune mais talentueuse réalisatrice. En seulement deux longs-métrages, Emerald Fennell, après un premier film qui lui a valu l'Oscar du meilleur scénario original, prouve qu'elle sera une des réalisatrices les plus prolifiques de sa génération.

Une maîtrise de l'art de la mise en scène qui se trouvaient déjà dans Promising young woman, mais qui se retrouvent ici poussée à son paroxysme. Enchaînant les plans mémorables, magnifiés par la fantastique photographie de Linus Sandgren dont les éloges ne tariront jamais sur son immense talent, Saltburn s'inscrit comme étant un conte tragique, diablement tordu, où tout est fait pour inscrire la gêne et la manipulation au cœur de son récit. Le spectateur se sentira volontiers gangréné par ce malaise viscéral, véhiculé par cette famille vampirique, répandant son venin à la moindre occasion, pour se faire mousser, pour se faire plaindre ou pour rabaisser les autres. Une gêne viscérale due à sa mise en scène bien sûr mais aussi à ses dialogues ciselés, particulièrement exquis et peu avares en cynisme - qui vous fera à coup sûr éclater de rire - s'inspirant du remarquable Le talentueux Mr Ripley.

Au-delà de sa plastique, c'est pour ses personnages, sa dramaturgie, et sa musique - entre autres - que vous devriez vous jeter à corps perdu dans cette aventure qu'est Saltburn. Un long-métrage aux qualités absolument remarquables, un beau cadeau de Noël pour les tops de fin d'année qui s'annoncent remplis d'excellents films, tant l'année fut exceptionnelle.