Eat the Rich!
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On connaissait la finesse de bulldozer de Emerald Fennell avec son Promising Young Woman qui faisait passer son message au forceps, mais le faisait avec flamboyance et en n'oubliant pas de faire plaisir au spectateur (on ne s'est jamais remis de la reprise de Toxic de Britney Spears). Mais on n'était pas prêt à accueillir un Saltburn aussi peu soignée et peu imaginatif, aussi tape-à-l’œil dans ses pseudo-scènes choc (trois petites scènes de déviances sexuelles, totalement gamines et pas impressionnantes pour deux sous) que vain dans son final décharné et encore une fois clinquant pour rien (l'utilité de la
danse à poil avec ce cadrage de plan fessier ?
On cherche toujours...). Pour ceux qui viennent attirés par le buzz "scènes chocs" de Saltburn : passez votre chemin, ces trois petites scènes sont mal filmées, jouent juste avec des tabous de cour maternelle (
on goûte au sperme et à la menstruation, et on copule avec le monticule de terre qui recouvre l'être aimé...
Bon, en gros, c'est un gamin qui joue à touche-pipi). Tous les personnages sont des marionnettes auxquelles on ne croit jamais (et les acteurs non plus... C'est la sieste ferme), du petit boursier qu'on devine trop rapidement être
un mythomane
(et le film se croit malin en nous montrant l'envers du décors comme des twists, alors qu'on a tout capté dès les premiers dérapages de l'étudiant) au grand charmeur très bêta sur les bords (Jacob Elordi, toujours enfermé dans le même rôle), en passant par le couple de riches qui surjoue à mort, la sœur qui n'a aucun intérêt narratif si ce n'est être la "sœur de"... Emerald Fennell pense qu'on ne peut pas comprendre son histoire, alors elle nous aide (trop généreuse, Mère Thérésa) : vous n'avez pas compris que c'est un karaoké de riches pour des riches ? Elle nous met donc le valet qui tient la boîte du karaoké (marqué en énorme dessus, sans style graphique, et sans aucune autre info de vente... Mais quelle marque voudrait de ce design ?) qui tire la tronche (pour bien dire qu'il subit son travail). Vous n'avez pas la réf de la musique Rent que chante le protagoniste, pas de problème, il la chante sans même regarder les paroles au début mais est horrifié de découvrir le refrain (comme si c'était la première fois qu'il l'entendait) qui le traite de profiteur. Vous n'avez rien demandé comme explications (parce qu'il n'y en avait pas besoin) ? Emerald vous en donne quand même : on voit
Oliver envoyer les messages de fausses accusations sur Farleigh (mais... on le savait depuis une heure, non ?), taper n'importe quoi sur son ordinateur pour bien montrer qu'il attendait la mère de famille (mais... il aurait pu taper de vrais mots, aussi, même des phrases sans intérêts qui auraient pu le couvrir si Madame décidait de l'aider momentanément dans son projet... Le fait qu'il tape n'importe quoi est en contradiction avec son machiavélisme minutieux jusque-là démontré), etc...
Tout le côté "coulisses" est contre-productif, il ne nous impressionne jamais, mais nous prouve à l'inverse que la réalisatrice s'imaginait sérieusement qu'on avait besoin d'explications sur des choses déjà acquises (traduisez : on est des écervelés finis). Emerald Fennell valide elle-même un côté décadent et grinçant de son film qui n'existe en réalité que dans sa conception ultra-gamine de ce qui est vraiment corrosif (à savoir chez elle : le bas du froc). On sature très vite du vide immense et terrifiant qui constitue son Saltburn, peuplé de marionnettes désincarnées, de ressorts narratifs sur lesquels on revient plusieurs fois (des fois qu'on n'aie pas compris) avec des twists qui ressemblent juste à des récap' de série télé, et une critique de la Haute qui a rarement trouvé autant de caricatures dans son propos. Sinon, pour l'histoire du coucou qui tombe dans un nid de piafs riches encore plus timbrés que lui, il y a L'Origine du Mal, avec Laure Calamy, qui est très sympa... Ou Parasite, la valeur sûre. Mais fuyez ce Saltburn qui se croit très malin, et vous très bête.
Créée
le 15 janv. 2024
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