Difficile de critiquer un film qui n'a au fond rien de très agréable ni excitant, et dont se dégage pourtant quelque chose de très fort. En effet, à la fois vrai film de fiction et quasiment documentaire, « Salvatore Giuliano » étonne par son ton sans concessions, évitant tout didactisme pour nous proposer quelque chose de particulièrement réaliste, comme en témoigne l'angle que Francesco Rosi a adopté. Quelle prouesse de ne faire quasiment jamais apparaître le personnage éponyme, pour au contraire s'intéresser à son aspect insaisissable, mais surtout à ceux qui l'entourent, ses alliés comme ses ennemis. De cette façon, le réalisateur parvient très bien à retranscrire la complexité de l'enquête, ainsi que les différents enjeux de la mort de Giuliano, comme en témoigne plusieurs scènes de procès saisissantes, d'autant que Rosi se garde bien de prendre clairement parti, préférant simplement évoquer les faits avérés, sans oublier pour autant les nombreuses zones d'ombre qui ne seront jamais éludées. C'est assez lent, mais s'explique par la difficulté de clore le dossier, d'avoir toutes les réponses, de comprendre tout ce qui a pu se passer et les intérêts des uns et des autres quant à l'assassinat du bandit... Une page peu glorieuse de l'Histoire d'Italie décrite avec talent et intelligence : du « cinéma-vérité » comme on aimerait en voir plus souvent.