Satire d'un monde encore et toujours gouverné par le paraitre, sous des formes nouvelles (marketing se parant abusivement, cyniquement, d'une communication basée sur des causes louables, progressistes; nature fallacieuse et vaniteuse des réseaux sociaux omniprésents aliénant les acteurs à leur insu...), le film pêche en se montrant régulièrement simpliste et trop explicite par zèle didactique, en commentant son propos, ce qu'il aurait dû délaisser aux seules situations narratives. Par exemple, le capitaine à Dimitry, au terme de leur aparté: "Vous ne pouvez pas être riche alors que le reste du monde est pauvre", et Abigail vers la fin à Yaya allant prospecter dans les collines, faisant suite à l'assaut grotesque de l'âne par Jormo: "Tu as réussi à instaurer un putain de matriarcat, tu as maté tous les vieux mâles dominants ". Qui plus est, le ton démagogique, jouissif lorsqu'il venge le cynisme de certains grands fortunés (la grenade), ratisse un peu trop large et s'émousse (racisme, jeu impérialiste des nations dominantes, rapports homme/femme...). Personnellement, la véhémence scatologique m'a semblé tiédasse. Je n'aurais pas été contre un véritable cataclysme excrémentiel à la puissance 15 (dans l'esprit Montypythonesque, ou célinien s'il on veut), une symphonie pestilentielle où débordements sous pression surnaturelle des sanitaires et retours gastriques expulsés par geysers de table en table, auraient causé par leur violence la destruction pure et simple du navire...avant la scène de la grenade ! Clap de fin.

Il y a certes une attitude cherchant l'épate chez Ruben Ostlund, mais le cynisme misanthrope qu'on lui reproche parfois pour son carton général toute classe sociale confondue, me parait injuste. La pédanterie en moins, Bunuel n'épargnât personne non plus dans "Viridiana" !

Rq: Bien aimé la scène du bar montrant la solitude du richissime Jormo et la mauvaise conscience de la cliente exigeant la baignade des employés pensant rétablir un semblant d'égalité !

Flip_per
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Solitude, Rapport de classes / Barrière sociale, Femme moderne, Film suédois et Apparences / Vernis social

Créée

le 3 mars 2024

Modifiée

le 3 mars 2024

Critique lue 9 fois

Flip_per

Écrit par

Critique lue 9 fois

D'autres avis sur Sans filtre

Sans filtre
Rolex53
8

Idiot, mais riche

Je comprends maintenant, après avoir découvert ce film, pourquoi sans filtre a obtenu la Palme d'Or. C'est tout simplement le talent d'un réalisateur suédois, Ruben Östlund, qui réussit la...

le 17 oct. 2022

174 j'aime

4

Sans filtre
Cinephile-doux
8

Le capitalisme prend cher

La nature humaine, surtout vue à travers ses bassesses et sa médiocrité, est le sujet préféré de Ruben Ôstlund qui n'hésite pas à pousser le curseur à son maximum dans Sans filtre (traduction oiseuse...

le 29 mai 2022

66 j'aime

14

Sans filtre
pollly
9

Avis de tempête

La croisière s’amuse Puisqu’il s’agit ici d’évoquer un film qui ne fait pas de la dentelle, allons droit au but : Triangle of Sadness est un film qui vous explosera à la tronche. Ruben Östlund...

le 2 juin 2022

65 j'aime

Du même critique

Pure Coolness
Flip_per
6

Critique de Pure Coolness par Flip_per

La tournure de cette comédie est finement menée, son écriture précise et équilibrée. Elle mets en dérision une certaine tradition patriarcale et plus généralement la posture masculine machiste dans...

le 24 juin 2024

1 j'aime

Orine, la proscrite
Flip_per
7

Critique de Orine, la proscrite par Flip_per

Tragédie mizoguchienne mettant en scène un monde aux conventions sociales rigides, aliénantes et mortifères, plus impitoyables encore à l'égard du petit peuple: une sexualité féminine entravée, des...

le 16 juin 2024

1 j'aime

Still Life
Flip_per
7

Tic-tac

Texte minimaliste et mise en scène épurée portant un regard d'entomologiste sur un couple de provinciaux, fonctionnaires en fin carrière, exclus du progrès dont bénéficie les citadins, traités sans...

le 10 juin 2024

1 j'aime