Globalement, il y a deux façons d'aborder a quiet place. Être happé par l'originalité du thème et pénétrer le climat anxiogène généré par une absence quasi totale de bruit. Ou bien tiquer sur une série de détails qui irritent, et déplorer une nouvelle très bonne idée de départ désastreusement exploitée.


Si vous vous placez dans cette deuxième catégorie, assez rapidement, une série de comportements des Abbott vous portera sur les nerfs. Passons sur ces détails - nombreux- comme de poser des objets qui-se-cassent-avec-fracas en haut de meubles, de vivre dans un endroit calme avec parquet flottant, ou encore de laisser l'enfant le moins aguerri seul en retrait lors d'une ballade.
(Après tout, il n'y a pas qu'elle qui fait dans le bizarre. Regardez le décors, avec ses maïs magiquement éternels.)


A travers cette famille, ce qui est remarquable, c'est la façon dont cette cellule de survivors de l'impossible (et extrêmement chanceuse: combien de jouets situés en hauts d'étagères ne sont pas tombés lors de leurs passages turbulents ?) ne peut se défaire de certains -et sacro-saints- attributs de l'american way of life, au péril de leur (sur)vie.
Ainsi, on continue à habiter une maison sans volets. On respecte la prochaine vie à paraître avant même de se dire que cette façon forcenée de se reproduire provoquera à coup sûr la fin tragique de toute la lignée (à moins de participer à une fiction fomentée par des scénaristes facétieux).
Et surtout, tout cela sans se départir d'un bénédicité pré-dinatoire du meilleur effet. On a a lors envie de se demander pour quelle raison les Abbott remercient leur bon dieu: pour avoir décimé 99% de la population mondiale, ou pour leur permettre de survivre dans la terreur de cet enfer silencieux ? Cela dit, ça faisait un moment que je m'en étais rendu compte: par définition, les croyants ne sont pas des gens rancuniers.


Ce qui est au fond surtout rageant dans toute cette affaire, c'est cette propension qu'ont les scénaristes de se tirer des balles dans le pied quand on ne leur demande rien. Le point de départ est donc très intéressant et prometteur. Pourquoi ajouter une demi-tonne de choses ridicules dans une trame tendue qui pouvait souffler son auditoire par sa sobriété ?
Les jump-scares foireux constituent un premier clou dans le cercueil de nos espérances (on devrait attribuer -1 de rigueur par scène inutilement sursautatoire). Sans parler de ceux (de clous) soudains dressés sur les marches d'escalier.
Mais surtout, pourquoi poser là comme une cerise faisandée sur un gâteau soudain trop riche une scène d'accouchement surréaliste (vérifions ? ah oui, les trois scénaristes sont des hommes) pendant laquelle l'héroïne pond en 5 secondes un chiard qui ne pousse aucun cri sous les regards troubles d'une créature étonnamment mono-sensorielle et de spectateurs désabusés ? Quelle est la plus-value de cette surenchère inutile et grotesque ? Pourquoi ne pas admettre que la tension cinématographique ne peut naitre (restons dans le registre de l'enfantement) que d'une petite forme de crédibilité ?


Au lieu de quoi, une partie des spectateurs, soudain, se sent perdue et désorientée. Coite. Bouche bée.
Silence dans l'errant.

guyness

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