Aussi surprenant que cela puisse paraître, aucun film n'avait été consacré jusqu'alors à la grande Sarah Bernhardt, par le cinéma français. Le biopic de Guillaume Nicloux était attendu et il n'est pas question de lui reprocher d'avoir oublié un quelconque aspect de ce "monstre sacré" du théâtre. Malgré sa savante déconstruction chronologique, le film a tout du devoir d'un bon élève, pas académique, non, mais quelque peu convenu, quand même. Celle qui fut surnommée la divine était également une scandaleuse pour son époque, femme libre, aux amours tumultueuses, et aux caprices de diva. Comme de nombreux ouvrages "historiques" récents, le long-métrage s'efforce de montrer la modernité de son héroïne, n'hésitant pas à privilégier des thèmes aussi prégnants aujourd'hui que l'antisémitisme ou le féminisme. Le film est aussi un défilé quasi ininterrompu de "stars" de l"époque, comme Lucien Guitry et son fils Sacha, incontournables, mais aussi des figures qui n'ont fait que passer dans sa vie, à l'image de Zola ou de Freud. Était-il besoin d'insister autant sur l'idolâtrie autour de la comédienne et sur son odeur de soufre ? Disons que la chose aurait parfois mérité un peu plus de subtilité dans son traitement. Pleinement investie, Sandrine Kiberlain relève le défi avec le talent qu'on lui reconnaît. Le reste de la distribution est un peu moins convaincante, à l'image de Laurent Lafitte, peut-être un peu noyée dans des décors et des costumes somptueux. Au fond, le mystère de Sarah Bernhardt reste toujours intact, plus d'un siècle après sa mort et l'on ne peut que louer le film de la montrer telle qu'elle fut vraiment, dans un bref extrait du fameux moyen-métrage de Sacha Guitry, Ceux de chez nous, réalisé en 1917.