Claude Barras, après l'immense succès de Ma Vie de Courgette, nous propose un nouveau récit aux intentions écologiques et activistes, dans la forêt tropicale de Bornéo. Ce film suit Kéria, une jeune fille qui recueille un bébé orang-outan dans une plantation de palmiers à huile où travaille son père. Cette rencontre marque pour elle le début d’un parcours de prise de conscience et de lutte pour la protection de la forêt et des peuples autochtones, notamment les Penans. Le film aborde des thématiques fortes comme la déforestation et la préservation de la biodiversité.
Techniquement, Sauvages impressionne. L’animation en volume est soignée, fluide, et immersive, créant un trompe-l’œil très réussi. Claude Barras conserve ici son style signature, avec des personnages aux têtes rondes et expressives et des yeux cernés de bleu, rappelant ceux de Ma Vie de Courgette. Les décors sont riches et détaillés. Les couleurs, vivantes et soigneusement choisies, rehaussent l’ambiance tropicale.
Le film brille particulièrement lors de son introduction et de son dénouement, où l’intensité dramatique captive et donne une belle évolution au personnage de Kéria, qui trouve un sens à son existence à travers son engagement.
Sauvages montre aussi des faiblesses notables, accentuées par la comparaison inévitable avec le film précédent du réalisateur. Le scénario manque de variations et de rebondissements ; l’intrigue est assez prévisible et se déroule sans surprises. Les thématiques écologiques et la lutte contre la déforestation sont abordées de manière simpliste et sans nuances, donnant parfois au film un aspect un peu moralisateur. Ce manichéisme, avec des antagonistes caricaturaux face aux « gentils » autochtones, alourdit l’histoire et la prive de la poésie qu’elle aurait pu transmettre. Certaines scènes, longues et répétitives, étirent inutilement le récit, contribuant à un sentiment d’usure chez le spectateur.
Un autre point faible majeur, peut-être le plus énervant, réside dans l'absence de musique digne de ce nom. Là où le film aurait pu s’illustrer avec des sonorités tropicales et immersives, il offre au contraire une bande sonore monotone qui manque de caractère et des nombreux moments de silence envahissants. Ce secteur décevant affaiblit certaines séquences et prive l’ensemble de l’ambiance envoûtante qu’on pourrait attendre d’une histoire se déroulant en pleine nature.
Quel dommage de voir un travail technique aussi chronophage desservi par des choix narratifs aussi clichés et une musique si peu recherchée.
Malgré ces défauts, Sauvages reste une œuvre attendrissante et visuellement remarquable, qui apporte aux jeunes spectateurs un message nécessaire sur des enjeux actuels, tout en les divertissant. Bien qu’il ne parvienne pas à égaler Ma Vie de Courgette, ce film est tout de même hautement honorable, car il conserve un charme indéniable et il mérite d’être découvert pour sa beauté visuelle et son engagement écologique.