Le Godard de cette période n'est déjà plus le trublion de "Pierrot le fou" et "A bout de souffle". Moins spontané, moins caustique, c'est un Godard sombre, artistiquement et intellectuellement, un Godard peu séduisant qui réalise "Sauve qui peut (la vie)".
Le film déroute au début par son dessein indéfini puis déplait par son austérité esthétique et dialectique.
Du style chaotique du cinéaste finit toutefois par se détacher le coeur du sujet: l'impossible, l'incompatible, selon Godard, relation homme-femme. C'est illustré dans un premier temps par les rapports brutaux et injurieux, entre Paul Godard (J.Dutronc) et sa maîtresse Denise (N.Baye). Dans le seconde partie du film -indépendante- l'apparition
d'Isabelle Huppert, interprétant une prostituée,
porte le débat vers la sexualité dans un langage très cru, pornographique, auquel Godard, de retour au cinéma après ses années d'experiences vidéo, ne nous avait pas habitués.
Si les invectives de Paul à l'endroit de Denise -qui le lui rend bien- mais aussi de son ex-femme et de sa fille ne donnent pas de l'homme, dans sa relation de couple ou de famille, une image flatteuse, comme s'il n'était pas à la hauteur, on verra que le genre masculin est, par la suite, à travers les fréquentations de la prostituée Isabelle, encore plus éreinté. Où les hommes, mus par des fantasmes pervers, réduisent la femme au rôle d'esclave sexuelle humiliée.
Cette vision abrupte, entre excès et lucidité, ce constat volontiers provocateur et sévère confinent quasiment au désespoir. Le thème n'est pas indifférent mais la sécheresse du style et du ton, l'absence d'humour et de dérision rendent le film peu avenant, c'est le moins qu'on puisse dire.