Sayat Nova - La Couleur de la grenade par PasBillyTheKid
Essayons d'être clair. Ce film-ci est souvent présenté comme un "poème cinématographique". Ce qui est souvent synonyme de ratage annoncé. (Pas ici). De quoi parle-t-on ? Il faut distinguer très clairement le poème cinématographique du film poétique. Un poème cinématographique est un film qui travaille le langage cinématographique comme un poème travaille la langue. Citons les œuvres de Charles Dekekeuleire, les premiers Henri Stork, D'Ursel, quelques Vigo, les tout premiers René Clair, Godard, Pelechian, etc.
Le film poétique, c'est au contraire ce que je vais fuir. C'est un film qui va montrer des "images" que le réalisateur estime "poétiques". On est dans le "poétique", pas dans le poème. Le pire exemple à mes yeux serait Gondry (La science des rêves), /argh, je me meurs/.
Après, certains ont du mal à faire de la poésie au cinéma et mélangent les deux. Bunuel par exemple. Il y a du poétisme (tout à fait compréhensible, il est un des premiers à en mettre) mais également un vrai travail du langage ciné.
Sayat Nova est dans la même veine : le poétisme inonde, il a un peu vieilli. Mais il y a un travail formel réel, un refus du narratif épatant, un travail du langage cinématographique important sur tous les points (cadrages, photo, mais aussi sons, montage, etc). Le film réussit donc son coup ! Il est bon et nous emporte ! (NB : il est nettement supérieur à "Achik Kerib", du même réalisateur, sur le même sujet : la biographie visuelle d'un poète...)