Il y a deux ans, le scandale de l’affaire Weinstein ébranlait le tout Hollywood et ouvrait une boite de Pandore à toutes les révélations qui ont suivi. Le mouvement metoo qui a suivi, et qui s’est répandu bien au-delà de la sphère de l’establishment hollywoodien, a profondément changé le paysage cinématographique actuel. Notamment au cinéma où on ne compte plus les films clairement féministes ou ceux mettant en avant la femme. Mais « Scandale » semble être le premier avatar à sortir en salles de cette nouvelle ère dénonciatrice du machisme ambiant dans l’industrie du spectacle et dans le monde occidental en général. Le long-métrage arrive peut-être un peu opportunément, vu la vague de sympathie que s’attire ce mouvement devenu à la mode, mais il a le mérite de bien parler du sujet en commençant par le commencement. En effet, il est question ici d’une affaire antérieure à celle d’Harvey Weinstein mais qui apparaît comme un cas précurseur à tout ce qui allait déferler ensuite : le licenciement du PDG de Fox News, Roger Ailes, dénoncé par ses employées animatrices de la chaîne pour harcèlement sexuel. C’était en 2016, un an avant que le cas Weinstein éclate. Mais cela anticipait déjà bien des changements et l’explosion de la bulle du silence en cours dans les médias et le divertissement.
Jay Roach à qui l’ont doit également le bon « Dalton Trumbo » s’était davantage fait connaître avec ses comédies à l’humour gras, de la saga « Austin Powers » à celle de « Mon beau-père et moi ». Il semble prendre le même virage que son collègue Adam McKay qui a signé « The Big Short » et « Vice » après avoir été coupable de comédies régressives plus ou moins réussies. C’est d’ailleurs à « Vice » que l’on pense ici, dans cette manière faussement légère mais poil à gratter de croquer une figure tutélaire non pas de la politique ici, mais des médias. Le cinquième pouvoir donc qui, on peut le voir intelligemment dans « Scandale », en détient beaucoup l’air de rien. On aurait aimé que la charge soit aussi virulente ici que dans le film sur Dick Cheney. Mais il faut avouer que ce que l’on perd sur le versant diatribe on le gagne sur le versant purement informatif, le propos du film étant bien traité sous tous ses aspects.
Entre réalisme des faits, passages à la limite du documentaire, ajout de personnage pour illustrer les enjeux en cours (celui de Margot Robbie) et tonalité équivoque, « Scandale » frappe fort sans jamais aller dans l’excès. Le film se veut limpide et didactique, et il l’est. L’affaire est touffue et si le scénario semble ne pas savoir par où commencer, il nous rattrape vite et on ne voit absolument pas les deux heures du film passer rendant le propos limpide au possible. On est captivé par le sort de ces femmes abusées qui vont finir par se rebeller laissant carrière et ego de côté. Le casting est parfait, d’un John Lighgow terrifiant en ogre carnassier et pervers à nos trois blondes actrices incarnant trois générations de femmes bafouées. Charlize Theron, immense, laissant peu de place à Nicole Kidman et Margot Robbie donc, mais celles-ci ne déméritent pas. La scène phare de l’ascenseur - et l’unique séquence qui les réunit toutes les trois - est d’ailleurs d’une éloquence rare sans qu’aucun dialogue ne vienne perturber la tension en cours. En relatant les faits tels qu’ils se sont déroulés et en portant aux nues une affaire prémisse d’un courant et d’une révolte qui n’a pas fini de faire parler d’elle, « Scandale » est un film dans l’air du temps. Une œuvre nécessaire et elle risque de ne pas être la dernière. Et le principal est qu’elle soit plutôt réussie dans les grandes largeurs.
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