« You know, the whole evil ex-boyfriend thing… » SCOTT PILGRIM

Le 18 août 2004 est publié Scott Pilgrim’s Precious Little Life de Bryan Lee O’Malley. C’est un manga / comics qui sera publié jusqu’en 2010 avec un total de six volumes racontant l’histoire de Scott Pilgrim, looser invétéré, qui doit combattre les sept ex maléfiques de la fille qu’il veut séduire. Bryan Lee O’Malley va recevoir de nombreux prix du meilleur nouveau talent pour son comics, notamment le prix Doug Wright, le prix Joe Shuster ou encore le prix Harvey.

J'ai découvert la bande dessinée de Bryan Lee O'Malley à la publication de son premier volume de « Scott Pilgrim's Precious Little Life » en 2004. Ayant moi-même une propension à marier le trivial à l'extraordinaire dans mon travail, j'ai immédiatement été captivé. J'ai adoré la façon dont Bryan Lee O’Malley utilisait l'iconographie des mangas et des jeux-vidéos pour décrire les émotions de ces jeunes gens.

Voilà ce que disait Edgar Wright qu’on connaissait de ses rigolards et efficaces Shaun of the Dead et Hot Fuzz. Aujourd'hui, affranchi de ses comparse Simon Pegg et Nick Frost, il se frotte à un défi pas piqué des hannetons : comment adapter en un film l'hallucinante BD en six volumes de Bryan Lee O'Malley ? C’est un peu le comics de tous les délires : déconstruction narrative et visuelle, fusion entre manga, comics, BD, jeu-vidéo et cinéma, elle remplit amplement le cahier des charges de l'œuvre inadaptable.

Et pourtant, Edgar Wright et son scénariste Michael Bacall ont réussis leur pari en évitant le piège de l'adaptation littérale au profit de l'interprétation. Effectivement pour réussir quelque chose qui se tienne en si peu de temps, les scénaristes ont choisis de piocher ça et là des éléments du comics, de sacrifier des pans entiers de l'histoire au profit du fil conducteur : l'épopée de Scott pour gagner définitivement le cœur de sa belle. Et ce, avec une telle maîtrise et une telle sincérité que même le plus intégriste des fans ne pourra lui en vouloir, tant au final, le film se tient de bout en bout, épouse parfaitement le propos original et l'emmène même plus loin à certains moments.

Scott Pilgrim vs The World sort en 2010 et se plante au box-office, mais devient culte au fil des années grâce au marché de la vidéo.

Scott Pilgrim est un looser, bassiste dans un mauvais groupe de rock de Toronto, les Sex Bob-ombs. Il sort avec Knives, une lycéenne que ses amis lui conseille de quitter très vite. Lorsque Scott rencontre littéralement la fille de ses rêves, il se met en tête de la séduire. Le voilà à courir après Ramona Flowers, une mystérieuse fille aux cheveux roses. Mais pour obtenir Ramona, Scott devra affronter ses sept ex maléfiques. Cela serait facile si ils n’étaient pas chacun dotés de pouvoirs puissants qui donneront du fil à retordre à notre cher Scott Pilgrim.

Ce qu’il y a de brillant dans ce film, c’est son sens de l’absurde dans l’univers qu’il dépeint. Comment prendre au sérieux une seule seconde un scénario pareil ? Mais la subtilité du film, c’est que Edgar Wright ne prend pas au sérieux son histoire. Chaque détail dans sa mise en scène, son montage, ses dialogues, sont calculés pour donner cet effet irréel à l’ensemble, comme si l’on s’abandonnait à un univers régit par les situations improbables qui ne semblent étonner personne.

Edgar Wright adapte une bande dessinée et en reprend les codes. Les cadres se séparent souvent en plusieurs cases, des onomatopées accompagnent les bruitages et une voix-off agit comme les voix-off de BD via des cases jaunes qui introduisent le contexte. Le rock a aussi une place toute particulière au sein du film. Déjà, Scott fait partie d’un groupe et joue en public. Puis, il se rend souvent dans ce magasin de CD. Et la présence d’un personnage nommé Young Neil ne fait qu’amplifier cette place omniprésente de la sphère rock.

La musique que Nigel Godrich compose dans ce film a également une place particulière, car il est aisé de dire que le film peut être une comédie musicale. Ses numéros musicaux recouvrent le film, et lui donnent cette ambiance si particulière. Enfin, le film puise de nombreuses inspirations du côté des jeux-vidéos. Si Pac Man est à de nombreuses reprises mentionné par les personnages, on peut y ajouter des utilisations de la musique de Zelda, le jeu Dance Dance Revolution, une barre de vie, un +1Up donnant une vie supplémentaire, et même la notion de boss via ces fameux ex maléfiques que doit battre Scott. Le film est littéralement construit comme un jeu-vidéo, avançant de niveau en niveau pour atteindre finalement le boss final afin de libérer la princesse grâce aux artefacts qu’il a récupéré au fil de son aventure.

En tête d’affiche, Michael Cera est drôle en looser sympathique, mais ô combien maladroit. A ses côtés, la très charismatique Mary Elisabeth Winstead incarne la très haute en couleurs Ramona, donnant vraiment corps et âme à ce personnage. A côté d’eux il y a une galerie impressionnante de seconds rôles qui parviennent à exister en seulement quelques répliques.

Edgar Wright dit avoir pris toutes les décisions concernant chacun des autres membres du casting avec l'accord et l'approbation de Bryan Lee O'Malley, c’est ainsi qu’on peut voir Chris Evans, Brie Larson, Kieran Culkin, Anna Kendrick ou encore Jason Schwartzman à l’écran. Une pléiade de nom reconnu, mais celle qui vole l’attention c’est bien la jeune Ellen Wong en Knives Chau, petite amie lycéenne et revancharde de Scott Pilgrim.

Scott Pilgrim vs The World est devenu avec le temps un monument de la culture pop et a fait de Edgar Wright un auteur geek et cinéphile dans lequel beaucoup de spectateurs se reconnaissent. Ce film, malgré son échec au box-office, fut un succès à tous les points de vue. Mais en plus de ça, c’est un vrai miracle qu’un tel film existe. Un film fait par un fan pour les fans. Il est rare de voir une telle passion de la culture geek mise au service d’un produit doté d’un budget relativement élevé pour une production comme celle-ci.

StevenBen
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le 10 nov. 2023

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Steven Benard

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