Scrap, c'est une bulle d'air ensoleillée, un frère et une sœur qui s'envoient des vacheries mais s'offrent de l'aide pure et désintéressée dès que l'un est en galère, c'est aussi un couple qui se bat pour avoir un enfant, c'est une femme qui donne tout pour retrouver un travail, bref c'est un groupe de sympathiques personnages qu'on a envie de suivre et surtout voir réussir. Vivian Kerr sort de ses rôles de séries pour réaliser la version longue de son court-métrage éponyme de 2018, directement inspiré des personnes qu'elle voit vivre dans leur voiture au quotidien, en essayant de rester toujours dignes (la question est posée : les biens matériels ont-ils un lien avec notre auto-estime et notre dignité ? Vous avez deux heures). Scrap nous a souvent donné le sourire, qu'il soit amusé par une vanne brillamment nulle (de celle qu'on se fait entre frangins et frangines : la dédicace "You suck" en est un bon exemple typique) ou attendri par l'unité de cette famille qui se tend la main sans rien demander en retour. Pour éviter le piège de la niaiserie, Vivian Kerr développe tout de même le personnage de l'épouse (qui n'avait pas un mot prononcé dans la version court-métrage, ni même d'histoire propre) qui est moins charitable que prévu (il faut dire que la sœurette ramène un bon lot de problèmes avec elle). Le rythme est très soutenu, la mise en image profite du bel ensoleillement de la Californie (et aussi de la pugnacité de Vivian Kerr à vouloir tourner dans la voiture, ce qui est logistiquement un enfer, mais nous a donné une séquence d'ouverture originale), la musique est soignée, quelques scènes restent en tête (celle du voisin qui traite Beth comme une péripatéticienne quand elle est dans sa voiture - donc qu'elle est pauvre, ce qui fait tâche dans le quartier -, mais lui fait des ronds de jambe quand elle fait ses courses - donc qu'elle a de l'argent -... Oui, on a râlé devant cette scène maline) et le casting est au top (en plus de Vivian dans le rôle principal, Anthony Rapp est un frère attachant, Lana Parilla est une épouse qu'on comprend malgré son caratère entier). Quand au titre, Vivian nous explique que les deux sens (pourtant opposés) du mot sont logiques : en tant que substantif, il signifie "les miettes" (celles que les personnages essaient d'attraper, le peu auquel on se raccroche pour avancer), et comme verbe, "renoncer" (ce qu'il serait plus facile de faire pour eux...). Alors, quel sens donner à ce titre, cette famille va-t-elle tendre les mains pour s'en sortir, ou baisser les bras ? Pour le savoir, ouvrez la portière de la voiture, et installez-vous avec Vivian (en poussant son bazar), et profitez de la ballade en famille.