- Vous pouvez aller vous faire foutre !
- Écoute-moi bien, petite salope, si tu raccroches encore une fois je te saigne comme une truie! Hé! Hé! Hé! Oui.
- C'est une plaisanterie, ou quoi ?
- Disons plutôt un jeu. Oui, c'est ça un jeu. Prête à relever le défi ? Blondinette... Tu me vois ?
- Je trouve pas ça drôle du tout ! Si vous continuez j'appelle la police.
- Ils arriveraient trop tard, voilà ce que c'est d'habiter un trou paumé.
- Qu’est-ce que vous voulez ?
- Voir la couleur de tes tripes.
(la sonnette de la maison retentie)
- Ahhh!!!... Qui est là ?... Qui est là ?... J'appelle la police.
- Il ne faut jamais demander qui est là. Toi qui aimes les films d’horreur, tu devrais savoir que ça porte-malheur.
Une nuit à Woodsboro, Casey une adolescente seule chez elle s'apprête à regarder un film d'horreur. Pour se mettre dans l'ambiance avant la séance elle met à cuire une poêle de pop corn "Jiffy Pop", soudain la sonnerie du téléphone retenti. Casey répond, un inconnu est à l'autre bout de la ligne. La conversation entre l'inconnu et l'adolescente se transforme en un petit flirt innocent, qui se métamorphose en harcèlement avec des appels téléphoniques répétés, puis des menaces de mort, pour se terminer sur un jeu morbide et mortifère. C'est ainsi que plus tard dans la soirée, la jeune Casey et son petit ami Steve sont tous deux sauvagement assassinés. La légende du Ghostface commence. À l'époque on n'avait aucune idée du sort tragique réservé à Drew Barrymore, que l'on pensait être la star du film. Une approche volontaire de la part de Wes Craven (avec le consentement de la comédienne) qui a voulu déstabiliser le public en faisant mourir la star du film dès la scène d'introduction, et en plus, dans des circonstances abominables et difficilement descriptibles s'apparentant à un véritable cauchemar.
Les parents de Casey arrivent à la maison sans s'apercevoir qu'à quelques mètres d'eux leur fille agonise. De sa voix écrasée par une pression sur la gorge, Casey les supplies de l'aider. Sans succès, sa faible voix ne parvenant pas jusqu'à eux, finissant fatalement entre les mains du Ghostface qui assènera la pauvre adolescente de plusieurs coups de couteau. Comme si ce n'était pas déjà assez diabolique, Wes va rajouter du machiavélisme avec les parents qui le téléphone en main entendent et assiste en direct impuissant au massacre de leur pauvre fille, qui dans un ultime effort de vie, de sa voix sanglotante, murmure : "maman... maman... maman..." La mère sort alors de la maison pour appeler les secours et finit par hurler de toutes ses forces devant la vision de terreur lui faisant face. L'horreur la plus totale et horrible, celle de sa pauvre fille pendu à un arbre les tripes à l'air.
Pourquoi est-ce que je commence ma critique par cette description ?
Cette scène d'ouverture parfaitement millimétrée illustre tout le talent et l'intelligence entourant cette oeuvre. 13 minutes de génie absolues. 13 minutes de maîtrise a l'état pur. 13 minutes de tension insoutenable, où chaque plan, chaque mot, chaque note de musique, sont parfaitement coordonnées pour offrir un ensemble absolument parfait. À ce titre je considère cette scène d'ouverture comme étant la meilleure introduction appartenant à un slasher. Un démarrage qui répond parfaitement à la continuité totale du récit et qui fait que je considère ce film comme un chef-d'oeuvre de l'horreur.
Le slasher miracle : entre le début et le milieu des années 1990, le genre "slasher" était considéré comme définitivement enterré par la plupart des critiques et du public auxquelles on pouvait difficilement donner tort devant le résultat assez catastrophique des licences ayant poussé le bouchon bien trop loin. Finalement, tel un mort-vivant qui attendait dans sa tombe le moment idéal pour se réveiller. Le film Scream par Wes Craven a ressuscité le genre grace à un film d'horreur brillant qui n'était pas seulement un succès critique et au box-office, mais qui a également rendu le genre "slasher" à nouveau efficace, inattendu, original et flippant par une véritable transformation du genre, au point de devenir une véritable tête de proue se dressant comme un chef-d'œuvre du cinéma moderne. Scream va ainsi de nouveau ouvrir la voie à des multitudes d'autres slashers. Alors que le genre était asséché, Wes a fait tomber une pluie diluvienne, qui formera un tsunami d'adaptation voulant surfer sur le succès de celui-ci, mais qui jamais n'atteindra sa qualité. Malgré quelques réussites isolées, aucun autre cinéaste ne parviendra à capturer l'essence, ni le fil artistique faisant l'intelligence et la grandeur de ce film. Si bien, que Scream reste encore à ce jour la référence ultime d'un nouveau modèle pour le genre slasher qui sera par la suite idiotement souvent décrié, rabaissé et moqué par le titre "teenage movie", qui pour beaucoup est un titre servant à rabaisser le genre. Je tiens à rappeler que Scream est bien plus qu'un long-métrage adressé aux "no life", "les nerds", ou encore "les geeks" d'horreur et que c'est une oeuvre cinématographique à part entière qui vient poser un nouveau concept auquel on à le droit d'être défavorable, mais que tout cinéphile se doit au moins de respecter pour sa représentativité.
- La virginité est un rempart contre le mal. C'est une des régles du genre.
- Quelle règle ?
- Tu ne connais pas les... Tu devrais avoir honte !
- Dans tous bons films gores, il y a des règles immuables à respecter si on souhaite rester vivant jusqu’au mot fin. Procédons dans l’ordre. Règle numéro un : surtout, jamais de sexe.
- Oh ! Non ! Bouhhhh !!!
- Pas d'exceptions. Pas d'exceptions ! En langage gore, « sexe » rime avec « mort ». Ok ? Règle numéro deux : ne jamais picoler ni se shooter. Boire est un acte avilissant qui conduit toujours à enfreindre la règle numéro un. Règle numéro trois : ne jamais, au grand jamais, dire en sortant d’une pièce « je reviens tout-de-suite » parce-qu’on en revient jamais.
- Je vais chercher une bière. Qui en veut une ?
- Ouais, je veux bien.
- Je reviens tout-de-suite !
En réalisant Scream, Wes Craven pose ce qui sera le jalon de la revitalisation du genre, tout en renouvelant l'exploit de recréer des icônes horrifiques mémorables avec des images terrifiantes et inoubliables. Scream est une rareté d'horreur, de parodie, de rires, de sensations fortes, de frissons et, dans l'ensemble, Wes Craven a conçu un autre classique de l'horreur incroyable. Un film unique en son genre et une magie qui prend tous les clichés du slasher et les retourne à l'envers par le biais d'une véritable satire autour des clichés de l'horreur qui va tout relancer et redéfinir. Ce film est un vrai régal pour les oreilles avec de nombreuses répliques cultes et des dialogues qui regorgent de citations aux classiques de l'horreur ainsi qu'à la pop culture comme : "L'exorciste, Hurlement, Psychose, Vendredi 13, Evil Dead, Dracula, Le train de la terreur, Le bal de l'horreur, Basic Instinct, Liaison fatale, Massacre à la tronçonneuse (seulement pour la version originale de Scream), Les griffes de la nuit (avec Wes Craven interprétant un homme de ménage portant la fameuse tenu de Freddy), Frankenstein, de James Whale (dont on voit un extrait du film dans un vidéo club), ou encore Halloween, la nuit des masques, de John Carpenter (1979)", et bien d'autres encore. Des références dans Scream il y en a partout et tout le temps, servies avec intelligence. Réussir un tel exploit en 1996, fallait le faire.
Que serait également Scream sans le scénariste Williamson qui délivre un scénario adroit et sournois rempli de dialogues intelligents et ironiques offrant un véritable style à cette intrigue engageante avec un parfait équilibre entre l'humour cynique et l'horreur. Wes Craven et Williamson offrent un duo implacable qui va offrir aux téléspectateurs durant presque les quasi deux heures qui composent le récit. Une trame unique et mystérieuse, où le drame, l'humour cinglant, la romance et l'horreur à travers divers éléments substantiels appartenant à tous les films d'horreur via des intrigues complexes et des rebondissements sous tension qui viennent offrir une image passionnante pleine de sang sur un tueur implacable qui va se servir des codes du cinéma d'horreur pour façonner ses meurtres.
Parlons du "Ghostface", le tueur au visage fantôme, qui est devenu une figure du mal iconique appartenant aux monstres classiques du cinéma d'horreur. Ce qui distingue Ghostface des autres tueurs du genre, c'est qu'il est particulièrement humain, se faisant souvent malmener, courant et gesticulant dans tous les sens pour atteindre ses proies. Il est particulièrement vicieux, prenant un malin plaisir en torturant psychologiquement ses victimes à travers un jeu téléphonique dans lequel il utilise ses connaissances des films d'horreur pour tester ses victimes. Si la réponse est fausse, la pauvre victime est condamnée à subir la sentence implacable du Ghostface par une lame froide pleine de rage.
La direction artistique est fluide et accomplie. La mise en scène de Wes Craven est incroyable, usant habilement de la caméra par des cadres intelligents qui apportent un style passionnant et inventif aux diverses séquences. Des scènes effrayantes et pleines de suspense réalisées avec une intensité puissante et explosive où la violence et le gore sont effrayants et dérangeants via un rythme très rapide qui jamais ne traîne en longueur. Les exécutions et autres scènes de mort sont créatives, venant allègrement vous transpercer l'estomac avec des personnages qui ne sont jamais en sécurité. L'autre point génial vient de cette parfaite fusion entre l'horreur et l'humour qui est très ironique et cynique puisque les personnages principaux sont conscients qu'avec ce qu'ils leur arrivent, ils sont tout droit projeté dans un film d'horreur dont ils connaissent justement tous les clichés et les éléments substantiels se produisant dans un slasher. Si bien, qu'ils définissent eux-mêmes, à partir de leurs expériences cinématographiques toutes les règles pour survivre dans un film d'horreur. C'est irrévérencieusement génial et fait tout du long réfléchir. Le score de Marco Beltrami est sensationnel, suspensif et intense et ajoute une atmosphère incroyablement inquiétante au film. Une partition musicale qui de manière authentique apporte une ambiance saisissante qui vient nous glacer le sang avec un lyrisme purement génial. Cette composition est sans aucun doute la meilleure oeuvre musicale de Marco Beltrami qui apporte un son brillant et unique en son genre, reconnaissable entre mille.
- Pourquoi tu veux qu’on ait un mobile ? Norman Bates en avait pas, lui !
- Non.
- Est-ce qu’on a jamais su ce qui a poussé Hannibal Lecter à se livrer au cannibalisme ! Le crime est encore plus effrayant lorsqu’il est purement gratuit. On lui a rendu un immense service à ta mère. C'était qu'une roulure qui exhibait son cul en ville en se prenant pour Sharon Stone.
- On a abrégé sa misérable existence parce qu'il faut dire ce qu'il est : ta mère n'avait rien de Sharon Stone. Hein ?
- C'est un mobile qui en vaut un autre. Il ne te suffit pas ? Alors écoute : ta salope de mère se faisait mon père, et c'est à cause de ta mère, que ma mère m'a abandonné. Pas mal comme mobile, hein ? L'absence d'une mère peut être à l'origine de graves troubles psychiques. Tu vois où ça t'a amené toi, à coucher avec un psychopathe.
- Eh ouais. Tu as fini par succomber. La vierge a été défleurée. Oh ! Oh! Oh! Oh ! Une histoire de sang. Tu as enfreint la règle, tu connais la sentence.
- Imagine qu'on est dans un film d'horreur. Essaye d'imaginer la fin.
Scream en plus de sa séquence d'ouverture absolument géniale apporte tout du long du récit une image vraiment effrayante, violente et ironique qui parvient à l'époque à prendre à contre-pied les connaisseurs du genre, nous faisant par là même sursauter, ronger et crier devant l'écran. Mais il y une chose qui mérite également d'être appuyé : son final ! Mon Dieu ce final ! Un dernier acte remarquablement et excellemment construit faisant monter à mesure des minutes la terreur absolue autour de la pauvre Sidney, avec une révélation implacable et attendue autour de l'identité du Ghostface. Une révélation incroyablement mise en scène qui va venir provoquer de véritables frissons d'inquiétudes quant au pourquoi du comment. Et surtout, quant à la portée mentale du cinéma d'horreur sur la psychologie des plus jeunes, qui des mots de Sydney sont : "devenus complètement tarée à cause des films." Une conclusion exceptionnelle devenue un grand classique (au même titre que la scène d'ouverture), avec des comédiens totalement possédés qui vont transcender l'ensemble par des dialogues toujours plus dingues, ainsi que des rebondissements qui vont alimenter le récit en sensations fortes, nous prenant au dépourvu pour toujours plus de cynisme et de folie. Même en revoyant le film, le fait de connaître la révélation finale ne diminue en rien l'impact et l'attrait particulier de Scream.
La distribution de Scream est parfaite, avec des jeunes acteurs motivés qui donnent des performances inspirées. La direction des comédiens de Wes Craven est exceptionnelle, les regards entre les acteurs sont intelligents surtout lorsque l'on revoit le film et qu'on connaît les tenants et les aboutissants. Cn comprend alors les différents regards que se lancent certains personnages, jusqu'à la gestuelle de ceux-ci. Neve Campbell incarne royalement Sidney Prescott, une adolescente moyenne qui se remet difficilement du traumatisme dû au meurtre et au viol tragique de sa mère un an auparavant par le prétendu Cotton Weary (Liev Shreiber), placé en prison en attendant sa condamnation à mort. Avec ce rôle, Neve Campbell devient la nouvelle reine du slasher succédant à la géniale Jamie Lee Curtis. Neve honore le genre d'une bien belle manière en étant une véritable guerrière qui passe plus de temps à se confronter qu'à crier. J'adore l'approche de ce personnage qui va transgresser la règle ultime du "PAS DE SEXE", et qui malgré tout va tout du long rester humble, grace à Wes Craven qui jamais ne la sexualisera honteusement pour en conserver toute son réalisme. Après tout le sexe fait parti de la vie, pourquoi devrait-il être condamné. Une nouvelle icône qui malheureusement passé cette licence ne brillera qu'à de rares reprises.
On découvre également la charismatique Courtney Cox en tant que Gale Weathers qui est piquante d'ironie et de culot. Une femme forte qui s'assume toute seule et qui trouvera en Dwight l'homme fragile de son coeur, qui dans la vraie vie deviendra son mari. David Arquette en tant que Dwight l'adorable et idiot shérif adjoint amène un regard novice à tout ce bordel. J'adore ses interactions avec Gale et surtout avec sa petite soeur Tatum, la meilleure amie de Sidney, qu'incarne savoureusement Rose McGowan qui connaîtra la fin de vie la plus culte de la franchise. Par contre c'est quoi cette minijupe orange psychédélique que porte la comédienne et qui te fait vriller l'oeil si tu as le malheur de lui matter les fesses. Jamy Kennedy pour Randy est vraiment exceptionnel. On s'attache énormément à ce personnage qui est le geek par excellence, le fan absolu auquel on s'identifie sans aucun mal. Matthew Lillard pour Stuart m'a littéralement laissé sur le cul! Durant l'acte final, il est terrifiant tant il est instable et perturber. Skeet Ulrich pour Billy Loomis représente le mâle alpha dans toute sa splendeur et sa gravité. Au premier abord il semble calme et mesuré, mais ceci n'est qu'une image masquant quelque chose de beaucoup plus noir, grave et instable. Bien entendu, obliger à rendre un hommage à l'excellente Drew Barrymore pour Casey.
CONCLUSION :
Scream est un grand classique de l'horreur, qui vient redonner vie au slasher à une époque où le genre est au plus mal avec une représentation médiocre de ceux-ci que Wes Craven en grand génie va transcender et redéfinir en modulant le concept à sa guise. Un scénario formidable pour un récit tyrannique, effrayant, cynique et drôle, pouvant compter sur une distribution motivée, une direction d'acteur incroyable, des dialogues particulièrement savoureux, une mise en scène intelligente, des meurtres percutants, jusqu'à la mémorable et effrayante partition musicale. Tant d'éléments qui font de Scream un film d'horreur inoubliable, intelligent et unique qui se dresse comme un chef-d'œuvre du cinéma d'horreur par un Wes Craven à son meilleur niveau. Je m'excuse pour la taille de cette critique, mais je me devais de parler en profondeur de cette oeuvre monumentale dont il y a encore tant à dire.
- "Quel est ton film d'horreur préféré ?"
- Peut-être pas Scream, mais il est assurément mon slasher préféré.
- Attention, c’est toujours à ce moment là que le méchant qu’on croyait mort revient à la vie pour un dernier frisson.
- Pas dans mon film.