Avertissement : si la lecture du début de cette chronique est sans danger, sachez cependant que son quatrième et dernier paragraphe regorge de « spoilers », qui risquent donc de gâcher la vision du film à tous ceux qui pensent encore que l'histoire est importante dans un long métrage... Au moins, vous êtes prévenus !

Après une trilogie achevée par un épisode malheureusement un peu faiblard par rapport aux autres, la saga « Scream » repart de plus belle douze ans plus tard, avec ce quatrième épisode vendu comme celui d'une « nouvelle génération », mais qui sonne aussi beaucoup comme un retour aux sources... A commencer par le retour du scénariste originel à l'écriture : le grand Kevin Williamson, ce génie du grand comme du petit écran, où il avait notamment signé l'inénarrable et novatrice série pour ado « Dawson », pas si éloignée que ça de « Scream », en fin de compte, dans sa tendance obsessionnelle à mettre en abyme le cinéma ! Mais c'est aussi l'occasion de revoir les trois « survivants que l'on croirait immortels » des chapitres précédents : à savoir Sidney Prescott, l'héroïne endurcie (incarnée par Neve Campbell), Gale Weathers, la journaliste désormais sur le retour (Courteney « Friends » Cox), et ce bon vieux Dewey, devenu shérif de Woodsboro (David Arquette). Force est de constater qu'ils ont tous pris un petit coup de vieux, renvoyant les spectateurs de la première heure à leur propre et douloureuse sénescence... Mais ce quatrième opus marque surtout, après un numéro 3 plutôt « édulcoré », le retour salvateur et en grandes pompes du sang qui gicle et qui pisse par tous les orifices que l'on peut rajouter dans un corps humain : l'occasion donc de jouir... pardon, de « mourir en série » tranquillement, comme il se doit finalement dans tout bon « slasher » qui se respecte ! D'ailleurs : « slasher », « se lâcher »... quelle différence ?

Comme à son habitude, Wes Craven illustre en bon faiseur, avec un talent certain pour l'efficacité visuelle, un scénario « taillé au couteau », si l'on peut dire... Le film réserve d'ailleurs bien des surprises, balançant entre le rire et l'horreur, et des séquences de meurtres souvent très bien emballées : on retient entre autres le massacre d'une jeune fille dans une chambre, avec spectateurs impuissants aux fenêtres de la maison d'en face, éviscération et éclaboussures écarlates sur les murs incluses ! Le tueur possède toujours un merveilleux talent sadique pour la mise en bouche (essentiellement téléphonique... mais jamais téléphonée !), puis pour la mise en scène de ses crimes...

« Scream 4 » file en outre le « méta » fort ! (méta-fort / métaphore, vous saisissez ? :) Les procédés de mise en abyme semblent effectivement partir dans tous les sens et se trouver à chaque coin de la pellicule... On se retrouve d'ailleurs très vite dans le bain de tout ce qui a fait l'originalité des films précédents à travers non pas une, mais pas moins de trois scènes d'exposition, toutes plus goro-ludiques les unes que les autres : la série des films « Stab » s'étant poursuivie dans le monde de la fiction (ils ont atteint les sept, autant que les « Saw » !), l'ouverture du film se présente ainsi comme un enchâssement de « film dans le film dans le film » qui donne le vertige et surtout l'extase cinématographique à son spectateur ! Ca commence fort, mais ça se poursuit aussi avec brio, notamment par un fil rouge laissant supposer que le « ghostface » est en train de faire le « remake » du premier film, mais avec de nouvelles règles, établies donc par une nouvelle génération, une nouvelle jeunesse encore plus folle et cynique en matière de dérives sanguinaires... Le méta-film se construit ainsi en multipliant les autoréférences à la saga (mais aussi des tonnes de citations à d'autres films d'horreur) ou les tergiversations sur le ou les suspects potentiels et le mode de pensée de ce tueur d'un nouveau temps... A l'ère des nouvelles technologies et des réseaux sociaux (incontournables références à Facebook ou à Twitter), on commence même à comprendre que l'assassin « réalise » lui-même le film en train de se faire, en filmant les crimes qu'il commet ! En terme de réflexions sans fin sur les « nouvelles règles » possibles, on s'amuse également d'une scène limite parodique entre les deux flics idiots chargés de surveiller la maison où se trouvent Sidney et sa « famille » : ils s'interrogent sur les gestes à faire ou à ne pas faire pour ne pas être le policier qui meurt en premier, surtout si le meurtrier va à l'encontre des clichés... Ils ne seront finalement pas déçus du résultat !

Le dénouement surprend furieusement et excelle à démontrer une génération de jeunes gens encore plus malade et malsaine que la précédente, pour qui la célébrité semble être la seule échappatoire possible à la vie moderne : « Je n'ai pas besoin d'amis mais de fans », conclura d'ailleurs la responsable du carnage, n'hésitant pas à perforer généreusement les organes vitaux de ses meilleurs copains ! Malgré des rebondissements proprement jubilatoires, on pourra regretter peut-être une fin presque trop sage : rechignant à sacrifier leur héroïne Sidney, les créateurs préfèrent laisser échouer, une fois encore, les plans machiavéliques des tueurs. A l'heure où le cynisme semble avoir gagné dans notre société pervertie, il aurait pourtant été habile de laisser la cousine de Sidney, la tête pensante du massacre, s'en sortir en accusant d'autres coupables qui se seraient entretués : des suites la mettant en scène avec son innocence de façade auraient probablement été géniales ! Sauf que non, elle meurt et c'est Sidney qui gagne en ressuscitant pour la... allez on ne compte plus les survies providentielles qui émaillent la saga : elles sont aussi ce qui en font le sel et les gags les plus énormes ! Du coup, « Scream 4 » clame finalement la supériorité des « anciens » sur des jeunes qui ont quasiment tous l'air de gros blaireaux : une métaphore du système hollywoodien et une revanche de Wes Craven, vieux briscard (re)venu des années 70 ? Pour saper le « remake / reboot » fomenté par sa tueuse de cousine, qu'elle trouve un peu trop irrespectueux par rapport à son histoire, Sidney Prescott, elle, n'hésite pas à lui rappeler qu'« on ne déconne pas avec l'original ! » Comme ça au moins, c'est dit, mais ça nous laisse du coup dans un drôle de flou quant à la suite de ce qui pourrait bien être une seconde trilogie ?
Phil_Sine
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le 15 avr. 2011

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Phil_Sine

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