Les Scream de Wes Craven possédaient deux arguments majeurs : une approche méta du sujet, qui déconstruisait le slasher sans pour autant tomber dans la pantalonnade. Au contraire : cette déconstruction passait par un univers et des persos tangibles, proches du spectateur tant par la culture que par les épreuves subies, ce qui permettait in fine de traiter les meilleurs opus (à mon sens, l'original et le 4) comme des faits divers réalistes. À la fois méta et crédibles, donc : un tour de force.
J'avais détesté Scream 5, qui prétendait perpétuer l'héritage de la saga en ne parvenant qu'à tomber dans tous les pièges qu'il dénonçait (en particulier celui du fan-service facile) au travers d'invraisemblances toujours plus... Eh bien... Invraisemblables. Je me fichais donc de ce Scream VI, pour finalement en ressortir tout content... Mais sans doute pour de mauvaises raisons.
Car le film fonctionne exactement comme son prédécesseur : dénoncer les tares du ciné actuel pour s'y vautrer, à ceci près qu'il le fait cette fois avec une telle fierté que sa connerie touche au génie. Il suffit que la geekette de la bande annonce que les franchises ont tendance à partir dans tous les sens pour que les réalisateurs appliquent ce constat au pied de la lettre : des morts sont ressuscités façon soap-opera, des gens se vident de leur sang pendant 15 minutes tout en dialoguant à l'aise (quand ils ne font pas de la gym, cf. l'hallucinante séquence de l'échelle tendue entre deux immeubles), Ghostface est si con qu'il trouve le moyen de louper les organes vitaux même armé d'un fusil à pompe, des gens se font charcuter de la tête aux pieds pour revenir peinards, les coupables grillés au bout d'un quart d'heure passent tout le film à tenter de donner le change en surjouant comme des malades, le fan-service s'accumule dans un musée aux atours de Batcave, des références pop-culturelles sont débitées au p'tit bonheur, des persos sont carrément oubliés en cours de route, les incohérences toujours plus énormes s'accumulent en fonction des besoins du "scénario", et il arrive même qu'on tape tranquillement la conversation avec Ghostface au téléphone.
J'aimerais croire que ce foutoir est voulu, qu'il reprend les tares des blockbusters actuels pour se foutre ouvertement de la gueule du monde, qu'il s'agit d'une gigantesque farce dont personne n'est dupe, d'un coup de troll à la Matrix Résurrections en somme... Mais l'angle souvent très sérieux du film me contredit. La vérité ? Scream s'enfonce dans les mêmes rouages qu'un Fast & Furious, niant toute cohérence pour s'enivrer de ses propres pets avec le sourire débile d'un enfant en bas âge. Les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît... Et pour une fois, peu m'importe : il y a longtemps que je n'avais pas tant ri. Et tant pis si la renaissance de Scary Movie passe donc par Scream !