Section spéciale par inspecteurmorvandieu

Costa-Gavras et son complice Jorge Semprun reviennent ici sur un des plus infâmant décrets promulgués par l'Etat français de Vichy.

Au lendemain de l'assassinat d'un officier allemand par de jeunes communistes exaltés, le gouvernement, pour prévenir les représailles allemandes autant que pour complaire à l'occupant, vote une loi d'exception créant une cour spéciale chargée de trouver des coupables...

Le film est une farce, une farce tragique. Le ton dont usent les auteurs est celui de la satire la plus corrosive. Les membres du gouvernement sont présentés comme des petits bourgeois fachos, voire des curistes gâteux; et, à l'excception d'un seul, les magistrats obtempèrent sans sourciller, ou avec des effarouchements qui n'en sont pas moins coupables, aux consignes politiques et à cette loi d'autant plus inique qu'elle introduit pour la première fois la notion de rétroactivité.

A l'époque du film, les corps concernés ont peut-être crié à la caricature et les historiens contester les raccourcis politico-historico-satiriques du cinéaste. Mais sur le fond, comment douter des accusations portées principalement contre ces juges dociles, se livrant toute honte bue, à une parodie de justice? Comment, au-delà, malgré le malheur sous-jacent de l'Occupation, ne pas s'amuser de la forme du film et des pantins pathétiques qui le traversent?

Dans deux parties distinctes -la mise en place et les discussions autour de la loi scélérate puis la série de jugements expéditifs- Costa-Gavras dirige une floppée d'habituels et estimés seconds rôles, tous parfaits dans de brefs et acerbes portraits. Sa mise en scène est légère, dynamique, inspirée. Le ton est partial, polémique, et c'est pour ça que "Section spéciale" est un très bon film, dans un genre de cinéma engagé qu'on ne fait plus malheureusement.