Portraits de femmes

A Kobe, au Japon, quatre femmes partagent une amitié sans faille. Un jour, l'une d'entre elles, June, disparait. Cette disparition entraine chez les 3 autres une profonde remise en cause et des décisions qui ne seront pas sans conséquences.

Senses (1 et 2, 3 et 4, 5) est un tryptique sorti en 3 volets en France sur 3 semaines. Au total, le film dure plus de 5 heures. Au Japon, il est projeté en une seule séance ponctuée d'entractes.

Attention, cette critique risque de vous spoiler.

Senses décrit une tranche de vie de 4 quadragénaires de Kobé, Akari (divorcée sans enfants), Sakurako (Mariée, un enfant, femme au foyer), Fumi (Mariée sans enfant) et June (Mariée en instance de divorce). June apprend à ses amies son divorce, est convoquée au tribunal pour une audience avec son mari puis disparaît.
La décision de June va entrainer une introspection chez ses 3 consoeurs qui ne sera pas sans conséquences.

Rupture du Pacte

Ce drame choral raconte une histoire captivante à base de destins croisés avec une minutie toute japonaise. A partir d'un atelier organisé par Ukai, un artiste, le parcours de ces 4 quadragénaires va être traversé de rencontres atypiques.
La focale part d'une description générale élargie des activités de ces 4 amies pour se concentrer sur leur univers quotidien, là où elles vivent avec leurs familles. Le portrait de leur quotidien est celui d'un modèle social usé, auxquelles elles n'adhèrent plus. A partir de cette prise de conscience désenchantée, ces femmes seront capables, en un instant, de prendre n'importe quel type de décisions, décisives pour elles et ceux qui partagent leurs vies. Cette capacité à "trancher dans le vif" n'est pas japonaise, elle est typiquement féminine, ce qui donne au film sa vocation universelle.

La société japonaise est souvent décrite comme patriarcale, bien éloignée des sociétés occidentales. Senses décrit pourtant des difficultés conjugales et des décisions prises par les femmes et nous montrent des hommes qui subissent. Soit ils s'entêtent à chercher un amour perdu (le mari de June),
soit ils subissent une séparation qui leur est imposée (le mari de Fumi), soit ils sont trompés (le mari de Sakurako). Pourtant, ces hommes japonais aussi rigides et froids que l'on puisse les imaginer n'ont pas donné de coups de canifs au contrat. La rupture du pacte est l'oeuvre de la femme.

On peut donc se demander si Ryusuke Hamaguchi, dont c'est le premier long métrage, n'a pas voulu décrire une certaine universalité de la prise de décision dans le couple....surtout à la fin du film.
Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit. L'atmosphère du film est très japonaise et les dialogues ponctués de "Désolé", "Merci", "Je vous en prie".... Le Japon, à l'image de la l'Asie (à l'exclusion de la Chine) éduque toujours aussi bien ses citoyens. Sur cette question, il y a un gouffre avec ce que l'on connait à Paris.

Ce que j'ai pensé du film:
J'ai trouvé personnellement que les 2 premiers volets du tryptique souffraient de longueurs (scène du restaurant dans Senses 1 et 2, longue scène de lecture publique dans un autre volet...) même si celles ci permettent aux personnages de créer des liens et d'interagir.

"In every dream home, a heartache..."

Ma note: 7/10