Serpico c’est avant tout une gueule. Celle d’Al Pacino arborant fièrement le barbe et les cheveux longs, le bonnet vissé sur la tête. Son « déguisement » est précieux, lui permettant de se fondre dans le paysage des bas-fonds new-yorkais. Frank Serpico est un policier de terrain. Tenace, perspicace, l’homme possède par contre un vilain défaut, l’intégrité. Rester incorruptible fait tâche dans le commissariat. Pire, c’est suspect.
Sydney Lumet réalise une superbe photographie du New-York des années 70, jungle urbaine au bord de la faillite où les immeubles délabrés sont le théâtre d’une violence quotidienne que la ville ne parvient plus à absorber. Cette ambiance joue un rôle important dans la réussite de Serpico, brouillant les lignes qui démarquent la loi étatique à celle de la rue. Ce flou permanent accentue la remarquable détermination du héros mais va également entraîner la métamorphose de l’agent Serpico dont la vie professionnelle prendra peu à peu le pas sur la vie privée pour finir par la submerger.
Fustigeant la corruption au sein de la police, le film rend hommage à l’agent Frank Serpico qui osa dénoncer ses confrères et supérieurs au nom de la justice et de la vérité. Un acte de bravoure qui entraina la création d’une commission pour éradiquer la corruption qui gangrénait la police new-yorkaise, mais qui faillit lui coûter la vie.
Possédant une très forte intensité dramatique, Serpico est un polar incontournable dont la mise en scène, proche du documentaire, immerge le spectateur dans un décor urbain à couper le souffle.