Après avoir été profondément marquée par la lecture du roman de Hans Fallada, j'étais très curieuse d'en découvrir l'adaptation cinématographique. J'ai opté dans un premier temps pour la première d'entre elle et j'entends prochainement continuer et clore la thématique avec la version plus récente de Vincent Perez.
Dès les premières instants, j'ai compris que de larges libertés avaient été prises avec le texte original de Fallada. L'amplitude de l'oeuvre écrite, par sa longueur et par son foisonnement psychologique, est à l'évidence peu compatible avec le format cinématographique.
Il n'est donc pas surprenant en soi que des choix éditoriaux aient été faits, avec la permission implicite que recèle la fameuse expression consacrée "D'après l'oeuvre de...".
Celui qui n'aura pas lu le roman auparavant aura un regard impartial, mais ce n'est pas mon cas et j'ai trouvé certains de ces choix très discutables. Beaucoup de situations sont très significativement raccourcies - et donc par la force des choses simplifiées - à tel enseigne qu'on se demande s'il n'aurait pas mieux valu ne pas les aborder du tout. Je pense notamment à l'histoire de la vieille dame juive mais surtout au dépôt des cartes dissidentes dans les cages d'immeubles qui n'est évoqué que très superficiellement alors que c'est une importante source de tension et de suspense dans le roman et qui, pour le coup, avait un fantastique potentiel de cinéma.
En plus de cela, beaucoup d'autres éléments narratifs ont été tout simplement inventés ou travestis. Le fait notamment que ce soit Anna qui soit l'instigatrice et l'auteure des cartes est à mon sens un parti pris qui n'était pas nécessaire, mais aussi passablement réducteur. Il donne à penser que la motivation profonde de ces actes de résistance - et donc de haute-trahison - est à trouver dans le deuil et l'amour maternel là où dans le livre, si la perte du fils unique est bien un élément déclencheur, les vrais ressorts poussant d'abord Otto puis son épouse à agir, sont à chercher davantage du côté de l'éthique, de la morale et de la volonté farouche de rester quelqu'un de bien quoi qu'il en coûte.
"Seul dans Berlin" mérite très certainement un format long, type mini-série, qui serait plus adapté à sa densité et à sa complexité, et permettrait de mettre en valeur sa riche palette et faire une juste place à chacun des personnages de cette remarquable fresque humaine au temps de la dictature.
A mettre au compte du film et pour équilibrer quelque peu mon propos, un casting assez judicieux l'actrice Hildegarde Knef qui donne corps avec talent et intensité à cette Anna audacieuse et vibrante qu'a voulu le scénariste et le dernier plan, lui aussi infidèle au roman, mais tout de même empreint d'une grande justesse, surtout au vu du titre original allemand.
Merci de m'avoir lue.
Amitiés,
Dustinette