Vendu comme un film assez dérangeant, il s'agit plutôt d'une sorte de thriller français (la patte du réalisateur, à priori). Le cinéma français voudrait faire du "à l'américaine", mais ne peut s'empêcher de le faire de manière assez maladroite... Alors quoi ? Trop de fromage dans le catering sur le tournage ?
Probablement las de ne pas y arriver, Dominik Mol finit par adopter, à défaut, un style gris, volontairement entre deux eaux, un mélange de hamburger et de raclette. On aime bien les deux, mais c'est un peu lourd et on ne s'en souvient généralement pas très longtemps.
Malgré une belle sélection d'ingrédients, ça ne tient pas très bien. Il y a des petites folies au niveau du casting et de l'écriture, pas mal d'égarements sur des détails pas oufs, des questions sans réponses, des pistes parfois prometteuses (comme la nécrophilie de Damien Bonnard, la magie noire...) qui mènent nulle part (zut !). On se demande si le monteur n'a pas essayé de tout sauver en arrivant un matin de crise et en disant : "Je sais ce qu'on va faire, on va tout recouper et faire des redites des scènes vécues par d'autres personnages !" On ressent un peu le délire "non finito" sur certaines parties, mais ce genre de mouvement reste à doser, car le spectateur n'a pas à se laisser hanter ou parasiter post-film par des éléments de narration irrésolus. On finit juste par oublier et s'en foutre, comme de notre premier burger français dans une brasserie moyenne.
Malgré un casting au top et très prometteur, les personnages sont pour certains tellement inconsistants qu'on se demande ce qu'ils foutent vraiment là. Le pauvre Denis Menochet, victime de broutage, se retrouve coincé dans un rôle lunatique écrit avec les pieds et livre ici une interprétation totalement caricaturale. Comment faire si le rôle est écrit exactement comme ça ?
"Seules les bêtes", une tentative de film choral à la Iñaritu franchouillard, pourquoi pas ? Sauf que bon... va falloir un peu s'arrêter avec les scénarios totalement cousus de fil blanc, les grosses ficelles, les twists de boomers, les facilités scénaristiques de type "Plus belle la vie" dont tout le monde aurait pu se passer. Ce n'est pas parce qu'en fait TOUS les personnages ont un lien les uns avec les autres que c'est une bonne histoire. Les liens sont tous assez artificiels. On aurait largement pu se passer de la scène de fin.
Une Laure Calamy merveilleuse dans un registre plus dramatique, Damien Bonnard qui incarne bien le personnage asocial et réussit à ne pas regarder le flic dans les yeux. Le flic Bastien Bouillon est tellement bon qu'il finit par nous manquer. Heureusement, on peut se tourner vers un autre film césarisé du même réalisateur où il joue un rôle similaire.
L'image est belle, après tout ce ne sera pas désagréable à regarder le dimanche soir sur France 3 avec la soupe et les charentaises.