Ce film a été unanimement apprécié lors de sa sortie et on peut le comprendre. Howard Hawks place l’héroïsme des aviateurs de la poste aérienne au cœur de son propos. Hawks avait déjà évoqué le même sujet dans Dawn Patrol, film sans rôle féminin, mais il rajoute ici une romance traitée de manière singulière.
Tous les faits et les personnages seraient authentiques, de même que le lieu, d’après Hawks. L’action se situe à Barranca mais il faut comprendre à Barranquilla, en Colombie. Rien ne permet de mettre Hawks en doute même si on sait que la MGM avait acheté les droits de Terre des Hommes de Saint-Exupéry. Chaque vol de cette époque, faut-il le préciser, était un défi lancé contre la mort. Les compagnies américaines n’exigeaient pas moins de courage que l’Aéropostale et les pilotes devaient affronter les pics enneigés des Andes, les tempêtes et les avaries mécaniques à bord de coucous sans aucune sécurité.
Cary Grant qui interprète le boss exigeant de l’escale, contraint de masquer sa sensibilité sous une carapace de dur, a ici un de ses meilleurs rôles. Les autres personnages ne sont pas négligés pour autant, du pilote perdant la vue au pilote n°4 (l'ancien titre du film) qui est poursuivi par sa mauvaise réputation. Il n’ aurait rien fait pour empêcher la mort de son mécanicien au cours d'une mission. Confronté à une nouvelle épreuve en plein vol, il fera preuve d’héroïsme pour se racheter.
Pour les rôles féminins on peut s’étonner que Jean Arthur ait un rôle plus important que Rita Hayworth. Elle donne de surcroît l'impression de ne pas trouver sa place dans ce milieu d'hommes. Howard Hawks a voulu ménager le suspense pour sa romance. On apprendra plus tard que Cary Grant a autrefois été blessé par une femme fatale (Rita) et c'est pourquoi il accepte difficilement la présence de cette danseuse de music-hall au milieu de son équipe.
Le film est aussi l’occasion de parler de Paul Mantz « l’aviateur d’Hollywood », pilote et conseiller technique, qui effectue ici une quinzaine de tours de vrille après avoir lesté de plomb l’arrière de son vieux Ford trimoteur. Pilote cascadeur, il était l’homme de tous les déplacements et de toutes les acrobaties aériennes. Même si Hawks n’a filmé que des maquettes dans les autres séquences spectaculaires, ce qui n’apparaît pas à première vue.
C’est que Howard Hawks avait été instructeur pour pilotes et il connaissait bien son sujet.
Seuls les anges ont des ailes s'inscrit parmi les meilleures histoires d'héroïsme et de camaraderie du cinéma.