Bonnie Lee fait escale dans un petit port bananier d’Amérique du Sud, Barranca, où elle rencontre les hommes d’une petite compagnie aéropostale, chargés de délivrer le courrier au delà des Andes. Le boss c'est Goeff Carter, un homme fataliste apparemment sans coeur, dont Bonnie ne pourra que s'amouracher bien évidemment, même si Goeff, lui "never ask anything from any woman"...
Tout comme Bonnie, on débarque dans la vie de ces pilotes et on découvre leur quotidien, leur façon de faire face à la mort. Pas de chichis si on ne veut pas craquer, il faut oublier ceux qui ont péri et penser à la prochaine éclaircie qui annoncera un nouveau décollage. Le film mêle avec brio les moments de bravoure et de virtuosité, à ceux beaucoup plus intimes où les peurs et les peines les plus enfouies refont surface. C’est un film plein d’humanité, dont le ton sonne toujours juste.
J’aime beaucoup le confinement dans ce restau/bar/hôtel qui sert de décor principal à l’histoire. Un huis-clos comme je les aime, un peu étouffant, très peuplé parfois, où tout repose sur le génie des dialogues et des acteurs.
Des acteurs formidables donc, emmenés par Cary « Like a boss » Grant évidemment, mais les autres sont loin d’être en reste, que ce soit Thomas Mitchell, le meilleur pote, Kid, 22 ans de carrière mais toujours aussi téméraire et attendrissant, ou bien Sig Ruman dit Dutchy, le propio au grand cœur qui n’aime pas les avions…
Mais pour moi le génie de ce film repose aussi sur le casting de Jean Arthur, actrice très intéressante et assez unique. Elle n’a pas le sex-appeal ni la beauté d’une Rita Hayworth (que je trouve au demeurant plutôt ordinaire dans ce film), mais elle possède cette sorte d’aura, de charisme qu’elle promène partout dans ce boui-boui avec sa voix si particulière. D’une certaine façon elle fait un peu tâche dans cet univers de pilotes sans lendemain. Parfois maladroite, elle s’accroche a Geoff (Grant) d’une manière un peu désespérée mais toujours fière, le remettant à sa place bien des fois d’ailleurs, ce qui fait plaisir. Elle a un jeu des plus formidables : regardez la balbutier, au moment du petit déjeuner, à la fois gênée et offusquée, regardez la rembarrer Rita lorsque cette dernière fait irruption dans la chambre de Geoff…
Elle est juste superbe, à l’image de ce film.