Shazam! La Rage des Dieux est un mauvais film, et ne devrait jamais être découvert par qui que ce soit. C’est mon avis que j’expose afin d’éviter aux lecteurs de ces lignes de subir son visionnage. Par conséquent, je m’essuie délicatement le postérieur avec les spoilers qui vont suivre.


Bien que le comité marketing de Warner Bros. soit le véritable instigateur et réalisateur de ce film, ce dernier est officiellement attribué à l’une des personnes les plus incompétente de la génération actuelle de réalisateurs, David F. Sandberg, responsable des films Dans le noir (2016) et Annabelle 2 : La Création du mal (2017). C’est à se demander si lorsqu’il réalise le premier film Shazam! (2019), il n’est pas déjà coupable de la “création du mal” absolu chez DC. Non aidé de la médiocrité du premier film, le deuxième vient de sortir du fond de l’Enfer en ce frileux mois de mars, sans surprise pour capitaliser sur le premier film, et gâcher une fois de plus le peu d’espoir d’avoir un film de l’univers DC regardable.


Commençons par l’aspect visuel de la chose. Je ne sais pas ce qui me donne le plus envie de vomir entre un cyclope aux mouvements saccadés et sans la moindre crédibilité visuelle qui se jette sur la caméra pour pousser un cri de fumeur en phase terminal, ou la gueule des filles d’Atlas (Helen Mirren et Lucy Liu) qui se sont visiblement pris le bouquin de géographie en pleine face à la vue de leur visage injecté de botox et de bouts de plastique pour faire tenir le tout. Je croyais que les dieux et déesses étaient des êtres bien plus beaux que les humains mortels. Cela dit, la fille d’Atlas incarnée par la féministe de comptoir Rachel Zegler, est visiblement bien plus jeune que ses sœurs, ce qui n’est jamais expliqué par le film. Il fallait bien cacher artificiellement la révélation de la filiation du personnage en la faisant paraître très différente des autres, quitte à sacrifier la cohérence. Je passerais aussi sur le design et la modélisation infâme du dragon que chevauche Lucy Liu pendant tout le dernier acte, telle une asperge sur une feuille de palmier morte.


Ensuite, concernant la mise en scène, ou plutôt l’absence de mise en scène, il est nécessaire d’évoquer la pauvreté ambiante des scènes d’action, qui représentent pourtant l’ingrédient phare de la recette de ce genre de film. Helen Mirren passe son temps à saisir le corps de Zachary Levi et le jeter contre des décors numériques, comme une vieille femme pleine d’arthrite tenterait de jeter son sac poubelle dans une benne à ordures trop haute. Triste spectacle que sont ces deux situations, et pourtant cela se répète inlassablement. Chaque personnage se tape machinalement, se rentre dedans et détruit des murs, et aucune chorégraphie d’action n’est proposée. La mauvaise idée serait d'enchaîner une séance de John Wick Chapitre 4 et une séance de Shazam 2 sans se mouiller la nuque entre les deux. On assiste également à l’énième plagiat des films DC de l’effet de style caractéristique du réalisateur Zack Snyder, à savoir les ralentis. Ceux-ci sont utilisés de la même manière qu’une tortue alcoolisée tenterait de reproduire les gestes d’un lièvre hydraté à la caféine, l’effet ne marche jamais et c’est dégradant pour les gens qui aiment Zack Snyder et le café.


Maintenant, parlons du résidu de pisse sur la cuvette des toilettes qu’est l’écriture de ce film. Nous assistons aux conséquences de la marvelisation des films DC, entamée en 2016 avec Suicide Squad. C’est-à-dire un film qui croit qu’il peut sacrifier toutes les scènes impliquant un tant soit peu le spectateur émotionnellement sur l’autel de la rigolade, un film qui se moque de ce qu’il est et de ce qu’il va laisser à son public. La définition du cynisme à la sauce Disney, qui empoisonne les blockbusters des autres studios et qui crée l’illusion de l’arrivée d’une pluie de billets verts pour l’éternité. Seulement tout cynique qu’il est, le film réussit même l’exploit d’échouer dans ce qu’il essaie de copier, comme l’élève qui se fait prendre alors qu’il recopie la feuille du voisin. Zachary Levi n’est pas drôle, ne pas comprendre qu’un crayon magique écrit le moindre mot que tu prononces et ne pas faire attention à ce que tu dis ce n’est pas drôle c’est idiot, être doté de super-vitesse et voler au milieu d’immeubles qui se déplacent très vite et se faire percuter par l’un d’eux ce n’est pas drôle c’est idiot, faire référence à la barbe de Hagrid ou porter un t-shirt des Goonies parce que t’a compris c’est un film avec des enfants/ados ce n’est pas drôle c’est idiot. Je pourrais continuer longtemps ainsi s’il ne fallait pas aborder les incohérences scénaristiques du film, véritable bijou d'exaspération. Le film nous présente un dôme magique que même les pouvoirs de Shazam ne peuvent briser, par contre une cocotte en papier volante (oui vous avez bien lu, une cocotte en papier volante) est capable de passer à travers, tout comme le son de la voix puisque des personnages parlent à travers le dôme. C’est d’une logique à faire brûler des livres de mathématiques. Les enfants/héros du film doivent aussi dévoiler leur identité secrète à leurs parents, mais au lieu de simplement prononcer le mot Shazam et se transformer devant eux, prouvant ainsi leurs dires, ils préfèrent tergiverser à l’oral avec leurs fausses apparences, aggravant les doutes des parents. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliquer.


Enfin, j’aimerais parler du pinacle spectaculaire du film, le moment de grâce du bouzin, la cerise sur le tas de merde, je parle bien sûr du climax. Le film ne démarre jamais, mais quand il démarre à la fin c’est trop long, un peu comme un vieux monsieur sujet à des troubles de l'érection. Chaque action d’un personnage est étirée au maximum et dure plusieurs minutes. Non je ne file pas de métaphore sexuelle, je suis forcé à la double lecture, car le MacGuffin du film est si joliment nommé “le gourdin”. Quand on parle du bout, pourquoi Shazam ne se sert pas du gourdin pour retirer ses pouvoirs à Lucy Liu lors du duel final ? Un peu comme cette dernière qui le fait depuis le début du film, au lieu d'échafauder un plan à base de batterie et de dôme rétrécie qui ne sert qu’à perdre du temps. Aussi, on a une batterie de personnages secondaires qui se retrouvent obligés de chevaucher des licornes gavées de M&M’s parce que sinon ils n’ont rien à faire pendant l’acte final, ça serait dommage d’introduire des personnages sans utilité scénaristique. D'ailleurs, pour votre culture générale, les M&M’s c’est ce que nous les humains avons de plus proche de l’ambroisie selon le film. Je me sens tellement proche des dieux quand je suce des cacahuètes. Tel le chocolat fondant dans le gosier des mortels, Shazam se sacrifie à la fin pour sauver le monde, parce qu’aucun membre de la Justice League ne pouvait être présent pour faire le boulot. Voyant cet acte héroïque au loin, et dans son dernier souffle covidé de vieille flétrie, Helen Mirren dit “alors lui, c’est un vrai héros” avant de disparaître en poussière. Mais existe-t-il une personne qui a sincèrement cru que le film allait assumer la perte de son héros principal ? Après que l’esquisse d’un sourire ait envahi mon visage en voyant ce personnage de Shazam enfin enterré six pieds sous terre, le désarroi est arrivé puis la douleur s’installa dans cette ultime séquence. Un personnage dit que pour faire revivre Shazam il faut l’éclair d’un Dieu, et qu’ils n’ont plus de dieux. Wonder Woman interprétée par Gal Gadot apparaît à l’écran en beuglant “il en reste un”, se désignant elle-même. Elle saisit le gourdin et produit l’éclair qui redonne vie à Shazam. C’est oublier que Diana n’est pas une déesse mais une Amazone, il n’y a rien de divin en elle si ce n’est le lasso et les poignets qu’elle a reçu. Cela rend la séquence incohérente et le film caduc.


Pour en terminer avec la bouse, je dirais que c’est la réunion de tous les pires clichés du genre super-héroïque, et de tout ce qu’il ne faut pas faire dans un blockbuster de divertissement. Il concentre toutes les erreurs possibles et rappelle les plus mauvais moments du MCU. Le film est instantanément naze et ringard. Le spectateur ne ressent aucun investissement émotionnel, il n’y a aucune prise de risque, les enjeux ne sont pas pris au sérieux et la morale est désuète. Mixer la mythologie grecque et des adolescents n’engendre jamais un produit culturel viable. J’ai pas aimé.


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le 29 mars 2023

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