Les premières minutes du film en forme de making-of sont franchement réjouissantes. On y voit les Stones faire et refaire les plans de la scène sur laquelle ils vont jouer, Scorsese négocier avec eux le nombre de caméras qu'il pourra utiliser et paniquer parce que le groupe tarde à lui livrer le set-list du show (il l'aura finalement à la seconde même où démarre le concert) ; bref, ça sent le rock à plein nez en même temps que l'entreprise ultra lourde et ultra rodée : c'est du sérieux !
Il y a aussi ce dialogue absolument génial entre Scorsese et l'ingé lumières du show, quand celui-ci lui dit :
- Il y a ce projo, si Mick reste devant plus de 18 secondes, il va cramer.
- Tu veux dire qu'il va prendre feu, avec des flammes et tout ?
- Ouais, il va cramer.
- On a besoin de ce projo, mais on ne peut pas brîler Mick Jagger.
Scorsese qui dit d'un air concentré "We can not burn Mick Jagger", c'est tout simplement énorme ! lol
Puis le concert se lance et là c'est une grande claque dans la gueule. Moi qui connais mal le répertoire du groupe et qui entendais beaucoup de titres pour la première fois, j'ai passé près de deux heures à headbanger sur mon siège du premier rang, parce qu'un concert des Stones sur un grand écran de cinéma ça le fait grave (tout comme le décolleté de la voluptueuse choriste Lisa Fischer sur grand écran !) ! Ces mecs-là connaissent leur métier et sont des mercenaires de scène redoutables, Keith Richards en tête, qui est ici la classe incarnée avec ses sourires carnassiers et son look Pirates des Caraïbes (il porte d'ailleurs un pins du film à un moment).
Les gus sont manifestement contents d'être là, ils sourient à tout va, s'échangent des papouilles, se marrent comme des gosses, ils ont l'énergie de leurs vingt ans et la classe rock de vieux roublards qui ont l'air de tout avoir inventé, d'être l'ultime incarnation du rock... Les voir comme ça est une grande leçon d'humilité et une véritable décharge électrique.
Le show est somptueux et les guests montent sur scène : Jack "je pète la classe" White, Christina "sexy" Aguilera, et le génial Buddy Guy pour une version démentielle de "Champagne and Reefer". La captation est géniale et le montage assez exceptionnel, on a l'impression d'être partout à la fois, de ne manquer absolument rien des grands moments et des petits gestes qui font de ce show un concert de titans. La salle est hystérique : dans le public on sait qu'il y a Bill Clinton (il vient saluer le groupe avant le début du show) et l’œil attentif parviendra à identifier Bruce Willis au milieu de la foule.
Le concert est entrecoupé d'extraits d'interviews très bien choisis, comme celui où l'on voit un Mick Jagger tout jeune dire "Le groupe existe depuis deux ans, je pense qu'on a encore de quoi tenir un an de plus" ou cette phrase plus récente de Keith qui dit "Ronnie et moi sommes d'assez mauvais guitaristes pris séparément, mais quand on joue ensemble on est meilleurs que dix autres".
On ressort de la salle un peu assommé avec un grand sourire sur la tronche en fredonnant un air des Stones, avec le sentiment d'avoir pris une magistrale leçon de rock. La très grande classe !