Je viens de me refaire mon tout premier Kubrick, que j'appréhendais de revoir depuis des années, craignant que mon souvenir lointain soit erroné par le fait qu'il s'agit d'un film marquant de mon adolescence. Finalement, je suis rassuré : il est meilleur encore que dans mes souvenirs.


Je n'ai pas lu le roman de Stephen King, mais à en croire les différences qu'il y a entre les deux œuvres, je pense que Kubrick a su interpréter et modifier Shining de sorte à en offrir une nouvelle lecture, à la fois cohérente et ambigüe. Ce film, c'est du pain béni, que ce soit pour un érudit, un cinéphile en herbe, ou même un adolescent fana d'épouvante. Chacun peut l'interpréter à son niveau, et rien qu'en cela Shining est particulièrement riche et plaisant, contrairement à 2001 qui, aussi excellent soit-t-il, reste très hermétique à un public novice.


Pour ma part, j'ai tout d'abord été subjugué par les images : l'hôtel Overlook marque tous ceux qui ont vu le film, par son esthétique et sa structure carrée et symétrique. Les différents plans, que ce soit à la steadicam ou à l'hélicoptère, ainsi que la musique oppressante et désorganisée de Penderecki ou les couleurs criardes de certaines scènes, accordent à Shining une ambiance singulière, unique, qui le classe parmi les films les plus incomparables que Kubrick ait réalisé.


L'intelligence des jeux de miroirs (notamment à travers le personnage de Jack) ou la beauté de certains plans comme la transition labyrinthique permettent d'interpréter aisément le film, de comprendre les manières de Kubrick. Pour un néophyte, Shining est un film limpide, évident et fluide. Excellent au premier visionnage comme aux suivants.


Jusque-là je suis très positif, mais Shining est tellement minutieux et parachevé qu'il devient difficile de lui faire des reproches. Même la scène très réussie de Ready Player One, en hommage à ce film, ne parvient pas à en retranscrire toute la subtilité et l’ambigüité. Pour autant, certains pourraient être réfractaires aux jeux d'acteurs plutôt grossiers (notamment Shelley Duvall, nominée aux Razzie Awards pour ce rôle). C'était en effet une volonté de Kubrick, d'avoir des expressions exagérées, car l'horreur est plus retranscrite par les visages que par les images.


Nominé à deux reprises aux Razzie Awards l'année de sa sortie, Shining sera peu récompensé. Il est pourtant aujourd'hui considéré comme un classique de l'épouvante et de la filmographie de Kubrick, un des plus grands rôles de Jack Nicholson et surtout un incontournable du cinéma. Je pense que sa réalisation millimétrée et originale rend ce film intemporel, d'où son statut actuel.

Monsieur_Cintre
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le 13 juil. 2019

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