C’est vrai que les tapisseries ressemblent vachement à des fusées, que Dany porte un pull sans équivoque ou encore que le numéro de la chambre 237 correspond (pas du tout exactement) à la distance terre-lune en miles. On connaît tous la mauvaise chanson de ce documentaire qui, en 2012, se la touchait sur ce chef-d’oeuvre du cinéma.


Mais avec Shining, il faut très vite arrêter les digressions adolescentes car le propos du film concerne plus sérieusement l’horreur d’une société moderne qui enferme l’être dans une prison sociale où la folie finit par poindre jusqu’à ça que l’impensable sauvagerie, que cette même société souhaitait réprimer, éclate.


Si un de nos ancêtres levait un os vers le ciel pour changer le cours de l’histoire dans 2001, un père de famille décroche un contrat de travail dans Shining, l’os moderne, pour changer (pas vraiment) le cours de sa vie qui glissait jusque là lentement vers le repli de la défaite.
Un patron, un contrat, un homme, sa famille et accessoirement un grand hôtel perdu au milieu d’une nature dont on a mis tant de temps à s’extraire au profit de villes organisées. Et avec ça Kubrick fournit l’effroi le plus fondé de l’histoire du cinéma.


L’hôtel c’est la structure matérielle, l’espace ouvert dans lequel évolue la famille. Tout y est à sa place, tout semble contenu comme dans une vie bien rangée. Mais rapidement le temps vient perdre les personnages, lundi, jeudi, un mois plus tard etc. La folie se distille et tout se compartimente jusqu’à ce que cette fracture se figure avec l’enfermement du père par la mère dans un garde-manger de l’hôtel. Le père devra donc en rester aux obligations alimentaires qu’il a envers sa famille. Evidemment il ne l’entendra pas de cette oreille. Il rentrera à la maison en fracassant la porte d’entrée avec une hache tout en lâchant « I’m home »… cette vision d’horreur que Kubrick a du père qui rentre de sa journée de travail est hilarante (si si).


Le labyrinthe c’est la structure mentale, surtout celle du père dans le film puisque, dans un plan dont « vous savez duquel je parle », c’est figuré. L’esprit est la première chose à laquelle a accès l’enfant dans sa compréhension du monde. A hauteur de tricycle il ne comprend pas grand-chose au monde qui l’entoure. Il s’en remet donc à ses émotions intérieures présentées sous la forme d’un « shining », pouvoir d’appréhension sensorielle du monde, instinct assez développé en quelque sorte puisqu’il ressent jusqu'à l’envie de meurtre de son père. Il finira par se confronter à ce croquemitaine dans le labyrinthe et non l’hôtel puisque ce dernier il ne le « saisit » pas. Cette lutte dans l’hôtel est menée par la mère. Un combat sur deux plans face à la folie d’un homme vaincu qui n'avait probablement jamais voulu mener une vie de batailles.


Le père meurt, la mère et le fils restent. Comme dans toutes ces vies qui sont un peu les nôtres. Une folie douce qui finit par habiter tout un chacun. L'être et le néant. L'absurde.


Bref, la famille, le travail, la société, la folie du quotidien, ce pousse-au-meurtre qui nous habite, tout y est. Sauf l’espoir. Kubrick nous gratifie ici d’un C.D.I. (Chef-D’oeuvre Infini) sans R.T.T. (Retraite en Toute Tranquillité). Le genre de film à voir en famille et à faire mettre dans sa tombe après une vie de dur labeur. Il faudra au moins ça pour en rire dans l’au-delà.

-Thomas-
10
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le 26 mai 2019

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Vagabond

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