Avant Take shelter, Mud ou Midnight Special, Jeff Nichols avait commencé sa carrière avec ce film-ci, beaucoup moins connu, et un peu plus sobre que les suivants. Le récit de cette haine entre deux familles issues du même homme est intéressant, mais il est difficile de se détacher, le film durant, du sentiment que Nichols aurait pu en tirer quelque chose de mieux. En effet, en-dehors du côté un peu « mollusques » des trois frères que l’on suit, qui nous empêche de nous attacher vraiment à ces personnages, beaucoup de longueurs viennent alourdir le film dans sa première partie. Certes, ces longueurs donnent de l’épaisseur aux personnages, en nous les montrant dans des situations de la vie quotidienne, mais font quelque peu retomber l’intérêt.
La deuxième partie du film remonte pas mal en se concentrant davantage sur l’affrontement entre les deux familles, captant davantage l'intérêt. Quelques scènes témoignent d’une belle tension, mais cette tension est toutefois légèrement affaiblie par un certain excès de sobriété de la part du metteur en scène qui s’empêche de montrer toute violence, excès préférable à la complaisance trop présente dans le cinéma américain actuel, convenons-en. Mais cet excès de sobriété contamine également les dialogues, parfois trop peu explicites, et qui auraient gagné à être développés, pour gagner en profondeur. Cela n’empêche pas Shotgun Stories d’être un bon film sur la haine et l'aveuglement qu'elle peut causer, mais un bon film qui se laissera un peu trop facilement oublier.