"Qu'est-ce qu'il y a de pire pour vous ? Vivre en monstre, ou mourir en homme de bien ?"
C'est sur cette interrogation qui vous obsèdera pendant un bon moment que se termine le tortueux thriller psychologique du virtuose Martin Scorsese. Et la première fois qu'on l'entend, cette interrogation : on reste scotché. On a d'ailleurs déjà plus qu'une envie : revoir dans la foulée cette immense adaptation du roman éponyme de Denis Lehane. Et la deuxième fois qu'on l'entendra, cette même interrogation scellant tout le désespoir d'un homme, elle s'avèrera encore plus poignante !
De toute façon, je ne me lasserai jamais de ce long-métrage tant son scénario retors se trouve exceptionnellement bien ficelé, tant Leonard Di Caprio, Mark Ruffalo, Ben Kingsley et les autres fascinent, inquiètent ; tant le thème principal de la bande originale est à vous glacer d'effroi ; tant l'atmosphère paranoïaque vous étouffe ; tant la poésie morbide qui s'en dégage - au cours de scènes psychologiquement violentes - ne manque pas d'esthétisme ; et tant l'écriture des dialogues relève d'une intelligence remarquable.
Les méandres du cerveau au souvenir de la violence, son aptitude à la défense, le sentiment indépassable de culpabilité, la paranoïa donc - et j'en oublie -, relèvent d'autant de thèmes psychanalytiques abordés avec une telle force qu'il me semble difficile de ne pas rester marqué à vie par ce film très ambitieux, dur et pervers.
Un chef-d'oeuvre à voir au moins deux fois.