Le cinéaste estonien Marrti Helde aime les dispositifs originaux pour des narrations qui ne le sont pas moins. Après les tableaux de Crosswind, son premier long-métrage, Silence scandinave se présente en trois parties, chacune reprenant le même point de départ : sur une route de forêt enneigée, une jeune femme prend à bord de sa voiture un passager qui n'est autre que son frère, tout juste sorti de prison. Dans la première partie, seule l'homme parle ; dans la seconde, c'est sa sœur qui monologue ; dans la troisième ... Le film ne dure que 75 minutes et se concentre presque exclusivement sur ses deux personnages avec de somptueuses vues aériennes de la nature en hiver qui servent de respiration. Le tout est en noir et blanc et l'on devine peu à peu le drame familial qui s'est joué quelques années plus tôt, avec toutefois pas mal d'éléments manquants. C'est très conceptuel et brillant, avec un dénouement un peu décevant. L'influence visuelle de maîtres tels que Tarkovski et Bergman est criante mais Helde a son propre langage qui, à l'évidence, ne peut séduire un large public. Il fait en tous cas partie de ces réalisateurs audacieux qui n'ont pas la crainte d'innover. Et c'est précieux dans un cinéma contemporain de plus en plus enclin au formatage.