Je n’ai jamais ressenti une telle colère à la sortie d’un film.
Ce biopic relate donc de la vie de Simone Veil, icône d’une femme s’étant battu pour l’avancée de l’humanité et de la démocratie. Elle a lutté pour le droit à l’avortement, pour de meilleures conditions pénitentiaires, pour la place des femmes dans le monde du travail et a sublimé son parcours par ses nominations de ministre, ses distinctions et son entrée à l’Académie française. Il est alors troublant d’assister dans la moitié du film à sa vie dans les camps, qui ne représentent que 6 ans d’une vie bien remplie. Cette tendance est des plus catastrophiques. La Shoah est instrumentalisée pour procurer des prétendues « émotions », à base d’images d’une extrême violence, de musique dramatique et d’effets de style d’une médiocrité absolue reprenant les topos cinématographiques afin de « cueillir » le spectateur. On assiste alors par exemple à des transitions complètement inadéquates entre son passé et la fin de sa vie, qui ne trouvent leur valeur que dans une esthétique qui se veut belle et fluide, mais qui en réalité détruit notre investissement dans l’histoire, déjà difficile à obtenir.
Ainsi ces pénibles deux heures vingts de visionnage sont un fourre-tout rapide et inégal de la vie de Simone Veil, exploitée pour servir une esthétique déconcertante. Ce n’est que du business.
L’incontestable importance et gravité des thèmes abordés empêchent alors d’en faire la critique. On ne peut aujourd’hui prendre le parti de faire un biopic historique esthétique à valeur économique pour répondre aux attentes du public. Le passé ne peut être mythifié et enjolivé, à l’inverse des biopics sur des stars de musique qui se fondent justement sur une idéalisation et une romanticisation. L’entre - deux de Simone, voyage du siècle est alors d’autant plus consternant que le défi esthétique n’a même pas été relevé. Ainsi, si cette esthétique purement artificielle et superficielle est vouée à servir un « bon film », qu’en est-il du cinéma français aujourd’hui?