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Cela fait trois ans que Skyfall est sorti en salles. Et quel film… Sans aucun doute, ce 23ème épisode de la saga a mis, entre guillemets, tout le monde d’accord. Avec un réalisateur Oscarisé à la barre, Sam Mendes, et un Daniel Craig d’une élégance rarement atteinte, cet épisode anniversaire pour les cinquante ans du héros a mis les petits plats dans les grands. Si beaucoup le considère comme le meilleur épisode de la saga (réussir à effacer le mythe Goldfinger n’est pas une gageure), il serait tout de même intéressant de revenir sur son succès, son pourquoi et son comment. Pourquoi cet épisode en particulier (est-ce simplement du au prestige de Sam Mendes ?) et comment y est-il parvenu, car derrière la volonté évidente de Skyfall à moderniser son héros, se cache une manière de faire pas si originale que ça, mais rudement habile. Surtout ; est-ce que cette ébauche perdurera sur une nouvelle manière de nous présenter le personnage ? James Bond a fait face depuis vingt ans à de nombreuses tentatives, certaines honteuses (Die Another Day) et d’autres plus ou moins appréciées (Quantum Of Solace), mais il semble que ce dernier épisode semble convenir à tout le monde. D’où tient-il alors son succès ?


Cela semble assez clair lors du visionnage du film : un héros patriote, protégeant son pays sous couvert d’une fausse identité, fait face à un double de lui-même sans le moindre scrupule. Un terroriste qui ne recule devant rien, prêt à tout saccager dans un simple désir de vengeance. Skyfall affiche sans la moindre hésitation sa filiation avec le Dark Knight de Christopher Nolan. Excepté le désir de vengeance de Silva (Javier Bardem) chez Bond, faisant face au Joker (Heath Ledger) souhaitant simplement créer le chaos, presque tous les éléments ont leur reflet. Et si au premier abord la relation entre les deux semble peu avenante, leurs origines mutuelles dans la fiction littéraire fini de rendre la situation tout à fait plausible. Pourquoi, après tout, ne pas user d’un héros désormais très ancré dans la culture populaire pour redonner forme à un autre qui semblait perdre, selon certains, son essence ? Le dernier Bond en date démarre donc par la déchéance d’une figure emblématique qui devra faire fi de ses anciennes méthodes pour cohabiter avec l’espionnage moderne, récit qui voudrait dire que Bond est une figure révolue face aux héros actuels (les super héros ou les espions types Jason Bourne). Pourtant les trois scénaristes au travail ici (qui ont déjà travaillé longuement sur la saga) ne peuvent s’empêcher d’accrocher Bond à ses gimmicks, toutes ses habitudes ayant contribuées à forger le mythe, jusqu’à la vodka martini que celui-ci rejetait en bloc dans Casino Royale. Le héros sans finesse, bourru au grand cœur que Casino Royale avait imposé a évolué à tel point qu’il redevient le représentant d’un charisme anglais qu’on ne retrouve que chez Sean Connery. Costumes sur mesure, beauté des lieux visités et sobriété du personnage font face à des figures plus modernes comme Q, expliquant que les gadgets à l’ancienne sont révolus. En somme, il est important de réhabiliter l’image d’un héros depuis la base jusqu’à ce qu’il redevienne ce qu’il était de plus charismatique dans son imposante stature lors de la séquence du gunbarrel.


Malheureusement, et malgré toutes les qualités plastiques et scénaristiques que peut posséder Skyfall, il y a cette sensation constante de trop vouloir en faire. Certes, il était important de remettre le mythe au goût du jour et il existe diverses manières de le faire, celle-ci étant la plus subtile. Pourtant elle ne l’est pas, dans l’absolue nécessité de créer des origines au personnage ou dans la structure du récit trop appuyée. La sensation est constante d’avoir affaire à une réactualisation du thriller de Cristopher Nolan en y ajoutant divers éléments liés à l’histoire bondienne. Certaines séquences ne sont par ailleurs que de simples décalques, comme l’évasion du bad-guy faisant irrémédiablement penser à l’évasion du Joker. Skyfall est sans cesse tiraillé entre ce besoin d’innovation et la pérennité des codes de la série, si bien qu’on ne sait pas trop si il veut présenter le personnage sous un nouveau jour ou remettre l’ancestrale figure masculine au centre de son image. L’exemple de Miss Moneypenny au départ femme d’action devenant l’habituelle secrétaire fantasmant sur Bond est frappant : le film a deux heures durant essayé de moderniser son image pour finalement réhabiliter un code dont il semblait vouloir se passer. Qu’en est-il alors ?


Bien que Skyfall soit un James Bond très réussi, il augure avant tout d’une volonté de relancer la série sur des bases saines. En se servant de l’image que Nolan a réussi à imposer avec son Dark Knight, les scénaristes remettent en valeur le mythe Bondien et y insèrent divers éléments centraux qui serviront de points d’encrages pour les épisodes qui suivront. Si le film manque de subtilité dans certains de ses dialogues, il est avant tout le représentant d’une série qui se doit de prendre exemple sur ses aînés pour espérer s’accorder les faveurs du public. En quelque sorte, Skyfall est une jolie anomalie, qui s’autorise quelques égarements pour repartir sur une figure charismatique qui semblait s’être un peu perdue en chemin.

Florian_Bodin
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le 10 nov. 2015

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Florian Bodin

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