Slumdog Millionaire, la première fois que je l'ai vu, j'ai lâché l'affaire au bout de vingt minutes, tellement le pathos dégoulinait jusqu'à en devenir obscène. Il y avait aussi cette façon de superposer l'Inde des bidonvilles, seule et unique vision toute européenne de la pauvreté, et celle de la carte postale des belles couleurs du Taj Mahal qui relevait de l'illustration tarte à la crème.
Ce soir, je me suis dit qu'il fallait aller jusqu'au bout, histoire d'être honnête. Les défauts relevés à la première vision restent réels, gênants et vivaces, ainsi que cette narration inutilement éclatée en trois parties distinctes, affèterie qui ralentit le film dès lors qu'il vient traîner ses guêtres dans le commissariat afin d'apitoyer un peu plus encore sur la destinée de son héros underdog transparent mais déterminé.
Mais aller jusqu'au bout du film m'aura permis d'être, peut être pas transporté, mais un peu réceptif, voire attendri par l'histoire d'amour contrariée, même quasi impossible, qui donne au récit qui emprunte finalement beaucoup au conte, un fil conducteur faisant que l'on s'attache malgré tout à ses protagonistes. Dommage que cela soit au prix de l'utilisation, pour Danny Boyle et son scénariste, de ruses de l'histoire, d'heureuses coïncidences et de ficelles aussi grosses que mon poing. Au point que plusieurs fois, je me suis surpris à penser "Non, ils ne vont quand même pas avoir recours à ça ?". Et si. Car tous les moyens sont bons afin que des mains invisibles puissent rapprocher les amoureux. Cependant, l'intérêt, de manière étonnante, devient bel et bien présent. La beauté solaire de Freida Pinto n'est pas non plus étrangère au phénomène tout à fait particulier. La couleur s'empare subitement du cadre quand elle paraît. Révélation. Attraction. Passion.
Malgré les défauts grossiers dont il est perclus et sa maladresse de tous les instants, je ne peux me résoudre à penser où à écrire que Slumdog Millionaire est un mauvais film. Il est à l'image de son personnage principal aux oreilles décollées, cultivant une passion et une attirance d'un autre temps, digne de l'amour courtois du Moyen-Âge, que la débauche de poncifs, de pathos et d'images d'Epinal sauce tandori ne saurait affaiblir.
Au point de me faire douter, à l'énoncé de la question fatidique, de la notre attribuée.
C'est votre dernier mot Behind ?
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Behind_the_Mask, indécis et bien embêté.