˗ Bonsoir !
˗ Bonsoir...
…
...
˗ Je voudrais une place pour Smile 2 s'il vous plaît madame la charmante caissière.
˗ Non.
˗ Non ?
˗ Non.
˗ Mais... Mais... Pourquoi ?
˗ Ben parce qu'il y a deux ans, avec vos singeries sur Sens Critique, vous nous avez flingué notre caisse.
˗ Pardon ?
˗ Vous avez oublié ? Quand vous avez entrepris trois petites bécasses à la sortie de Smile. Pour leur dire que si vous les croisiez encore dans une salle en train de foutre le bordel, vous les en dégageriez à coups de pompe dans le train... Les spectateurs ont déserté pendant une semaine après ça, par peur de rencontrer votre connerie de masque, votre violence choquante et vos propos déplacés.
˗ Ah ouais, quand même... Hé bien... Désolé.
˗ Ouais...
˗ Et pour ma place pour Smile 2 ?
˗ C'est toujours non.
˗ Mais pourquoi ? Que puis-je faire de plus à part m'excuser ?
˗ Partir. C'est qu'on ne veut plus vous voir dans une salle qui passe un film d'horreur chez nous. Et puis, je pense qu'on vous permettra d'économiser huit euros...
˗ Pourquoi ? C'est naze ? La bande-annonce avait l'air bien pourtant !
˗ Ben non, c'est naze. Surtout si vous avez aimé le premier.
˗ A ce point ?
˗ Bah ouais. Parce que Smile 2, c'est une suite qui n'aurait jamais dû voir le jour. Comme Joker : Folie à Deux.
˗ Mais c'est bien, pourtant, Joker : Folie à Deux !
˗ Vot'gueule, c'est moi qui cause dans votre connerie d'avis là. Vous, vous écoutez. Smile 2 ne fait jamais avancer le schmilblick de sa malédiction. Il se contente de la reformuler en espérant que le con qui regarde est atteint de la maladie d'Alzheimer. Le film te réexplique donc ce que vous avez vu il y a deux ans. Le seul changement, c'est que la victime n'évolue plus dans le milieu médical mais dans celui de la chanson.
˗ Comme dans Trap alors ?
˗ Sauf que Naomi Scott, on l'entend jamais chanter une chanson complète. Parce que c'est couvert par le bruit d'enfer qui secoue la salle à chaque petit jumpscare. Parce que Parker Finn a peut être peur que le public s'endorme.
˗ Ah oui, quand même. Y'avait pas ces problèmes-là dans le premier. Et puis, le premier film, c'était plutôt tendu et moins bourrin que ce à quoi le genre nous habituait...
˗ Bah oubliez tout ça. Smile 2, c'est en mode « plus » : plus bruyant, plus gore, plus puissant, plus long (2H12!) et plus idiot.
˗ Ah bon ? Parker Finn a lâché les chevaux ?
˗ Non, y'a pas de chevaux, j'ai dit que c'était plus idiot. Suivez un peu, merde ! Le pire, c'est que tout n'est pas à jeter, hein. Le milieu du spectacle que le film arpente est plutôt bien vu, avec la pression subie par les artistes, leur exploitation, leur entourage qui nie leur souffrance... A mon avis, c'était le terrain idéal pour une suite. Sauf que le réal, il ne fait pas le tri dans ses idées. Il essaie de se renouveler un peu, mais il ne réussit qu'à foirer le concept de son premier épisode en voisinant plus d'une fois le ridicule.
˗ Le ridicule ? A ce point là ?
˗ Ben ouais ! Y'a même une séquence où le mal joue à un, deux, trois, soleil avec sa victime ! Tu le crois ça ? J'ai totalement décroché après ça. A moins que c'était après la prestation crétine de la chanteuse qui essaie de présenter un gala de charité ? Ou quand cette gourde se plante un tesson de bouteille dans le pied ? Je ne sais plus. De toute façon, dans Smile 2, le trauma est beaucoup moins fort et intime qu'en 2022, on a du mal à s'attacher à cette artiste et à s'inquiéter pour elle. Et puis, la seule scène vraiment traumatisante, on arrive même à l'annuler dans un final beaucoup trop démonstratif... Je suis sûr que vous n'allez pas vous y retrouver et que vous allez débiner comme il faut. Tenez, je parie une place que vous allez vous marrer en réalisant que certains personnages apparaissent et disparaissent de l'écran comme des pop up de sites porno au cours d'une navigation louche sur internet.
˗ Bon, c'est que vous donnez pas du tout envie de regarder Smile 2, là...
˗ C'est l'idée, on ne veut plus vous voir devant un film d'horreur pour effrayer le client, c'est ce qu'on m'a dit.
˗ Bon, j'imagine que je vais aller voir Smile 2 ailleurs, alors...
˗ Ben ouais...
˗ Hé bien... Bonsoir alors.
˗ Au plaisir de pas vous revoir...
Le masqué étant curieux, il est donc quand même allé voir le film dans une autre salle malgré les avertissements. Et tout ce que lui a dit la caissière s'est révélé exact : Smile 2 n'aura donc pas attendu très longtemps pour toucher les limites de sa formule. Au moins, la salle était quasi déserte en 2024 : Behind_the_Mask n'aura même pas eu à rétablir l'ordre.
C'est peut être mieux ainsi.
Behind_the_Mask, des visages, des figures.