L’injustice étant partout dans ce bas-monde (même quand il est réduit à un train), j’attaquais Snowpiercer avec deux a-priori très positifs.
Y a d’abord le fait que je sois passé en quelques mois de "le cinéma asiatique m’emmerde un peu" (si si, j’en ai même fait une liste) à "il m’intéresse autant que les autres" grâce aux (beaucoup trop) nombreux fondus qui arpentent les arcanes de SC. Ajoutez à cela qu’au sein de ce cinéma, le coréen est de loin celui que je prise principalement, et que, EN PLUS, Bong Joon-Ho est le réalisateur que je trouve passionnant entre tous (ce passage à l’ouest n’infirme pas, en l’occurrence, ma position).
Y a ensuite que j’adore les films qui se passent dans un véhicule clos.
Vaisseau spatial, bateau, sous-marin, et donc train, il m’en faut pas beaucoup dans ce genre d’univers pour que je biche comme un teenager.

On va pas se mentir, il y a à peu près dans le transperceneige autant d’incongruités vibrantes que dans l’immense et informe flopée des blockbusters récents que je conchie avec plus ou moins de bonhommie et de régularité sur ce site. Oui, mais y a aussi et surtout nombre de trucs tout à fait bonnards qu’on ne voit plus souvent dans ce type de production.

Une forme de noirceur et de radicalité devenue peu fréquente dans un genre de fiction massivement orienté vers un public ado heureux de s’engouffrer du pop-corn par pleine poignée en attendant le happy-end inéluctable. A plusieurs reprises, l’impression agréable d’assister à un old-SF movie (mettons, circa 75-85) que n’aurait pas renié un Carpenter en grande forme ou Cronenberg inspiré. Pour preuve, le (//SPOIL//) nombre famélique de rescapé en bout de course, dont le destin n’en reste rien de moins qu’hypothétique (//end of SPOIL//)

-Train-train quotidien-

Alors bien sûr, je pourrais revenir sur des points relevés ça et là dans les critiques négatives que je me suis fait un devoir de parcourir, et démontrer que souvent l’incohérence mentionnée n’en est pas une, mais je me livrerai alors à un jeu que je déplore chez la plupart des détracteurs de mes critiques négatives, et je m’en voudrais terriblement d’être à mon tour si puéril. (Je parle bien entendu d’éléments factuels et pas de théories fumeuses -l’arme favorite du fanboy- sur le sens profond de la vie (caché au quinzième degré) derrière une scène misérablement ratée)

Oubliez (ou appréciez) l’hommage aux jeux vidéos (chaque wagon comme un nouveau niveau, la scène de baston dans le noir), passez outre la parabole pesante de l’humanité circoncise à la composition d’un train (sans doute présente dans la BD française à l’origine du film) dont le destin est de tourner indéfiniment à vide, et montrez-vous ouverts à cet espace fermé (pouf pouf), goûtez-en le pessimisme froid comme une sombre barre de protéine et embarquez dans deux heures d’agréables et inventives pépites visuelles qui vous donneront envie de vous jeter tout nu dans la neige en fin de projection.

Non, finalement, la seule vraie incohérence de la soirée était bien (outre la rencontre fort agréable avec de nouveaux SensCritiqueurs -monsieur et madame Johnutella-, rencontre qui contribue à agrandir à chaque fois un peu plus notre noyau de membres du sud-est qui se rencontrent IRL) la seule incohérence était bien, disais-je, la découverte que l’un d’entre nous, membre actif et émérite, reconnu du plus grand nombre, n’a jamais vu ni Alien, ni Blade Runner.
Oui, vous avez bien lu.

Etant coincé entre une affection quasi-paternelle et un sens du devoir indéfectible, je me dois de vous donner un indice sur l’identité virtuelle de l’impardonnable fautif: son avatar fût longtemps jaune et joyeusement bondissant. Vous pouvez l’éradiquer de la liste de vos éclaireurs séance tenante, si toutefois vous aviez fait l’erreur de l’accueillir au sein des gens de goût dont vous prisiez jusque là l’avis.
Autant dire que son avis sur ce même film sera de peu de poids.
guyness

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