Les sœurs Laperoussaz ont, pour leur premier film, souhaité mettre une bonne partie de leur enfance dans « Soleil battant ». Où commence la fiction, ou s’arrête la réalité ? Cela on ne le saura jamais. Le postulat est intéressant lorsque l’on voit cette jeune famille profiter de leurs vacances dans une immense maison dans la campagne portugaise. D’ailleurs, au début, le trouble s’immisce et on sent que quelque chose hante les parents. Abandonnant très vite les chemins du suspense en dévoilant le nœud de l’affaire, l’intrigue prend alors le chemin du drame psychologique. Et bien mal lui en prend car tout le venin qui aurait pu se fondre dans le film s’évapore. Et plus le temps passe, plus le long-métrage prend une tournure étrange et répétitive dont on se désintéresse.
L’accumulation de malchance vécue par la famille devient fatigante et le film devient redondant. On a du mal à être émus par ce que subissent les personnages et même à en saisir la psychologie. Dans ces conditions, il est difficile de faire naître une quelconque once d’empathie envers eux. En effet, l’émotion reste aux abonnées absentes et malgré les larmes rien n’y fait, on reste totalement hermétique à leur malheur. On ne peut en vouloir aux acteurs qui font ce qu’ils peuvent, notamment une Ana Girardot, belle et solaire. Mais surtout à des petites jumelles absolument renversantes de naturel à tel point qu’on a l’impression qu’elles ne jouent pas, mais sont vraiment en train de vivre leurs vacances à hauteur d’enfant. En ce sens, la direction d’acteurs (ce qui n’est pas une mince affaire pour les jeunes pousses de cet âge) est en tous point remarquable. On est plus partagé quant à Clément Roussier qui alterne bonnes et mauvaises scènes.
En revanche, ce que l’on ne peut enlever à la sororité Laperoussaz c’est la manière dont elles optimisent leur décor. Ce coin perdu et désertique du Portugal est magnifié jusqu’au sublime. Entre couchers de soleil en contre-jour, plans larges sur la pampa ou séquences contemplatives dans la nature, « Soleil battant » a de la gueule. Une séquence où les jumelles se sauvent et vont dans l’eau est même d’une beauté rare. Il manque cependant un fond sonore plus présent et marquant pour rendre cela plus envoûtant, plus hypnotique. Ici, tout cela devient lassant et on finit par s’ennuyer. Comme souvent la forme a beau être belle, il faut que le fond suive. Attendons donc le prochain long-métrage des réalisatrices pour voir si de belles promesses formelles se greffent à un scénario plus consistant et moins erratique qui n’abandonne pas ses meilleures pistes.