Han est un jeune homme de la rue. Malin, roublard, il se décide à s'extirper par la ruse des bas-fonds de Coruscant avec son amie, Qi'ra. Cette dernière, rattrapée par les stormtroopers, ne pourra hélas s'échapper et Han se retrouvera seul... Pour fuir la justice, il intégrera l'armée de l'Empire afin de devenir pilote. Nous suivrons son épuisante vie à l'armée mais, pour insubordination, il sera renvoyé. Au cours de ses pérégrinations civiles, il se liera d'amitié avec un wookie à qui il aura sauvé la vie dans une rixe de rue.
Plus tard, il combattra les gangs armés afin de retrouver Qi'ra, qui mourra dans ses bras. Trahit par ses amis, désabusé et solitaire, le contrebandier et son wookie regarderont l'horizon du haut de leur bébé volant avec l'âme brisée d'un homme qui ne peut plus faire confiance aux autres.
SPOILER : Ce film ne raconte pas cette histoire.
Car non content de pédaler dans la semoule avec sa nouvelle trilogie, l'équipe de Kathleen Kennedy semble n'avoir tout simplement rien compris au personnage de Han Solo. En effet, le personnage iconique de Georges Lucas était dépeins comme un contrebandier solitaire, roublard et égoïste, un homme de peu de foi. Au cours des trois films qui composent la trilogie originale, il évoluera, comprendra, et décidera de se sacrifier pour ses ami(e)s (bon, pas trop quand même, Georges Lucas ayant décidé de le sauver d'une mort évidente dans le Retour du Jedi).
Ainsi, dans ce spin-of totalement vain (qui veut réellement connaître les origines d'un personnage avec un background si mystérieux ?) on nous montre un Han qui ne semble pas apprendre grand chose durant sa "quête initiatique" (ce qui n'est pas sans rappeler les personnages de la nouvelle trilogie, me direz-vous), qui reste tout du long du film un grand héros altruiste et ce jusqu'à la fin. Exit le traître qui fuit les problèmes, exit le contrebandier qui n'est intéressé que par l'argent, exit le bonhomme solitaire et égoïste que nous découvriront dans Un nouvel espoir. De toute façon, à quoi bon ? Sa quête, sa rédemption, sa Grande Histoire, on la connaît tous depuis la fin de la trilogie de Lucas.
Par conséquent, mais que raconte donc ce Solo : A Star Wars Story ? Et bien pas grand chose car, si à la surface on nous raconte une aventure possiblement appréciable - mais sommes toutes très fade - dans des décors encore peu exploités dans SW, mais qu'on esquisse seulement (les bas-fonds de Coruscant, par exemple), c'est avant tout une incompréhension totale du personnage et de qui le compose qui est mise en avant, démontrant avec brio que, non, Disney et son équipe n'a rien compris à Star Wars.
Passons Alden Ehrenreich qui semble bien loin d'Ave Caesar!, enfermé et limité dans son jeu par la production. Pas facile de devoir jouer Harrisson Ford jouant Han Solo. De toute façon, il était évident qu'il serait difficile, voir impossible, de succéder à Ford. A tel point que pendant une majorité du film, le fantôme de Han made in Harrisson Ford semble hanter le métrage.
Outre sa sortie en mai (?!), peu de temps après Les Derniers Jedi donc, et une production des plus chaotique (Lord et Miller virés à 1 mois de la fin de tournage, Howard reshootant 80% du film...), c'est surtout l'histoire qui pose problème. Certes, on perd pour beaucoup le côté western spatial annoncé et les décors sont bien peu exotiques, faute du reshoot global du film (plus on avance dans l'intrigue, plus on se retrouve en cadre serrés, dans des décors extrêmement sombres et limités). Mais c'est avant tout dans son récit que Solo... pêche. A vouloir trop en dire, Disney démystifie totalement son personnage, allant même jusqu'à se borner à expliquer l'origine de son nom de famille.
_ Un nom de famille ?
_ Je n'ai personne...
_ Vous êtes seul... Hmm, Solo, voilà votre nouveau nom.
_ ...
_ ...?
_ ...!
Passé une indigeste explication, l'origin story se poursuit, cochant une à une les cases du fan-service (rencontrer Chewbacca, fait. Lui donner un surnom, fait. Rencontrer Lando, fait. Rencontrer le Faucon Millénium, fait. Le récupérer, fait. Expliquer pourquoi il finira sur Tatooine, fait...).
Bon sang, quand est-ce que les scénaristes comprendront que l'on a pas besoin de ça pour apprécier le personnage ? D'autant plus qu'à trop vouloir rattacher les wagons avec la trilogie originale, Han Solo termine le film en allant se foutre sur Tatooine. Alors il lui est arrivé quoi, depuis ? Bah il a attendu Luke pendant dix ans dans sa cantina. Merveilleux. Et Chewbacca, parlons-en. Quitte à expliquer la naissance de son amitié avec Han (les deux meilleurs amis de toute la saga Star Wars, tout de même), il aurait été sympathique de ne pas faire du wookie un figurant durant les deux tiers du film.
Mais c'est bien la fin de cette petite quête qui semble mettre le spectateur dans une incompréhension totale, Han décidant de sacrifier son argent et son mentor dans un but purement altruiste, allant soutenir une minorité vouée à nourrir la rébellion. Solo aura beau passer son temps à dire que "oulala, je suis méchant, pas gentil du tout", "nan mais je vous donne tout l'argent mais je suis pas un gentil hein ! Rejoindre la rébellion... Naaaaan, je suis un méchant, un bad guy..." Qui y croira ?
Inlassablement, la nouvelle équipe de production de Lucasfilm semble s'obstiner à décortiquer, démystifier et déconstruire la mythologie conçue par Lucas...
Solo : A Star Wars Story participe donc à une refonte totale du personnage de Star Wars, s'éloignant presque à l'extrême de ce qui faisait le caractère et la personnalité de Han Solo, ne gardant qu'un cadre vaguement ressemblant à ce qui aurait pu être sa jeunesse.
Un Han Solo d'une autre dimension, ou d'un autre espace temps, celui de la firme Mickey-Kennedy ?