Cette « Musique pour une ville et six percussionnistes » (2010) est le long métrage issu, dix ans après, d’un court intitulé « Music for one apartment and six drummers » (2001), des mêmes Suédois Johannes Stjärne Nilsson et Ola Simonsson. Mais regarder le court, facilement disponible sur YouTube ou Arte, avant le long, n’est pas une bonne idée car c’est un brouillon qui ne donnera pas forcément envie, ce qui serait fort dommage.
En effet, ce qui n’était qu’un concept laborieux est devenu une œuvre certes conceptuelle, mais très abordable car simple (pas simpliste) et comique. Et très critique.
La musique classique, c’est plus difficile, élitiste, traditionaliste, et c’est bien plus chiant (avec le solfège, les partitions, et le chef d’orchestre) que les percussions. Un métronome remplace l’homme, et, avec deux baguettes ou tout ce qui vous tombe sous les mains, on tape sur tout ce qui bouge ou ne bouge plus, « objets » du quotidien allant de… disons du tampon encreur au ventre d’un hospitalisé.
L’officier de police Amadeus Warnebring est né dans une illustre famille de musiciens. Ironie du sort, il déteste la musique, elle lui est même physiquement insupportable. Sa vie bascule le jour où un groupe de « terroristes » déjantés décide d’exécuter, illégalement et dangereusement, une œuvre expérimentale en utilisant la ville comme instrument de musique… s’attaquant aux institutions.
Ont lieu quatre performances aux titres provocateurs, et pas mal de désordre.
Il y a dans cette histoire sulfureuse un élément fantastique, qu’on ne perçoit pas tout de suite, qui ajoute à son charme. Et une aimable invraisemblance.
Qui, même exclu du conservatoire, parviendrait à un tel résultat sonore en quelques jours ? "L'enregistrement seul a duré un an, suivi ensuite par une longue période de mixage, supervisée par le compositeur Magnus Börjeson chargé d'utiliser les sons du groupe avec ses propres compositions." Lequel joue – c’est le cas de le dire – à l’instar des autres musiciens, sous son propre nom.
Le bruit est une arme. En anglais, les significations de "sound" et "noise" sont parentes. On ne sait trop s’il y a dans ce film une dénonciation ou au contraire un éloge des musiques électronique, industrielle, improvisée, vivante. En tout cas, c’est audiovisuellement rythmé et plutôt jouissif. Tant pis pour Amadeus qui rêvait « d’une musique faite de silence », ou tant mieux ?