De ce côté de l'Atlantique, on connaît assez mal les Marx Brothers, une fratrie d’humoristes très célèbre aux Etats-Unis autour de la moitié du XXième siècle. Tout au plus peut-on retrouver quelques bons mots de leur cru dans des recueils d'humour. Mais, dans leur pays, ils ont été d'immenses stars, et, encore aujourd'hui, ont conservé une aura très forte. La Soupe au canard est considéré comme leur meilleur film.
En échange de sa contribution financière pour sauver le pays de Freedonia, Madame Teasdale impose l'un de ses protégés, Rufus Firefly, au poste de président. Le pays de Sylvania, voisin mais rival, sent l'opportunité se présenter d'envahir un petit coup Freedonia. Surtout que Firefly est vif et agité mais pas vraiment clairvoyant ou fin politicien.
Je ne peux pas juger si le film est très représentatif de l'humour des Marx Brothers, mais on pourrait catégoriser celui-ci en deux composants. Le premier se voit et s’admire, ce sont tous les gags visuels, très bien chorégraphiés, souvent assez inventifs. Bien qu'inspirée d'une scène similaire de Max Linder dans 7 ans de malheur, la scène du miroir est mythique, elle a été reprise ou parodiée de nombreuses fois, c’est un petit bijou comique. Le deuxième ingrédient de la recette s’entend, c'est un humour qui fonctionne beaucoup sur les calembours et les jeux de mots. Et c'est probablement ce qui fait que le groupe se soit mal exporté. Ce sont des jeux d'esprit souvent assez faciles, mais balancés avec beaucoup d'assurance, généralement à la chaîne. En VO, c'est impossible à suivre pour moi. Je ne sais pas ce que vaut la VF. C'est dommage, mais cela donne des échanges verbaux assez soutenus, dont on peut capter au moins une partie de l'humour.
Certains ont vu aussi dans Soupe aux canards une critique de l'Italie de Mussolini. Il ne faudrait pas sur-estimer le propos, ce n’est pas aussi prononcé que dans Le dictateur, mais c’est bien un film qui se moque des absurdités de la politique et de la guerre, et cela fait toujours plaisir. De grands moments parsèment le film, mais il faut aussi s'habituer à l'énergie des Marx Brothers qui gesticulent et parlent tout le temps, loin de la nonchalance poétique de Chaplin ou de celle athlétique de Buster Keaton. C’est tout de même hautement appréciable à découvrir, on s’amuse beaucoup, et les Marx Brothers devraient être plus connus de ce côté de l’Atlantique.