On dit parfois que les Géorgiens sont les Méditerranéens du Caucase mais ce caractère ne saute pas aux yeux chez les cinéastes locaux, plutôt sombres, sauf si l'on remonte à Otar Iosseliani. Sous le ciel de Koutaïssi, d'Alexandre Koberidze, vient donc à point nous rappeler qu'un film peut être libre, facétieux, magique et drôle avec un conte amoureux qui témoigne aussi de la passion du réalisateur pour le cinéma, le football et beaucoup d'autres petites choses qui embellissent le quotidien. Cet hymne à la vie s'empare malicieusement des hasards et sortilèges de l'existence humaine pour narrer une histoire riche en digressions qui semble se réinventer à chaque seconde. La durée de 150 minutes, qui peut paraître excessive eu égard à certaines scènes langoureusement élégiaques et parfois trop longues, se justifie par l'envie de Koberidze de prendre son temps et d'installer une atmosphère souvent rêveuse et amusée, qu'une voix off, qui s'adresse parfois directement au spectateur, vient éclairer, mêlant réflexions graves et notes plus légères. Il y a bien des choses étonnantes dans Sous le ciel de Koutaïssi comme par exemple l'apparence physique des deux principaux protagonistes qui change un beau matin ou encore des chiens amateurs de football, entre autres anomalies du réel qui semblent finalement aller de soi par la grâce d'une narration qui trouve d'emblée le juste équilibre entre poésie et réalisme. Primé à Berlin, What do we see when we look at the sky ? (titre international) s'impose à l'évidence comme l'un des films les plus originaux et positifs (ce n'est pas incompatible) de l'année.