‘Sous le ciel de Koutaïssi’ est un film que j’aurais aimé aimer davantage. D’abord on ne voit pas un film géorgien tous les jours. Mais au-delà de la nationalité du film, il s’y dégage une agréable et rare fantaisie et un aspect délicieusement littéraire. Trop long, le dispositif m’a vite lassé et je suis totalement sorti du film.
Lisa et Giorgi se rencontrent deux fois le même jour dans la ville géorgienne de Kutaisi. Ces deux rencontres suffisent pour qu'ils tombent amoureux l'un de l'autre. Sur le chemin du retour, Lisa est avertie d'une malédiction dont elle a été victime par un semis, une caméra de sécurité, une gouttière et le vent. Lorsque Lisa et Giorgi se réveillent le lendemain, ils se rendent compte qu'ils ont l'air complètement différents. La malédiction est de faire en sorte qu'ils ne se retrouvent plus.
Le film reprend le schéma assez classique de la rencontre entre un homme et une femme, donc Claude Lelouch s’est, entre autres, fait le spécialiste. Un homme et une femme se croisent par hasard, tombent amoureux, se recherchent. Mais ici, le metteur en scène « pervertit » ce genre balisé en y ajoutant un soupçon de fantastique. En effet, victimes d’un sort, les protagonistes ne cesseront de se croiser sans jamais se reconnaître. C’est déjà assez drôle et puis cela engendre un joli suspens. Les deux amoureux se reconnaitront-ils un jour et si oui, quand ? Tout cela évoque en sous-texte la parfois difficile communicabilité entre les deux sexes.
Ce qui est criant pendant le visionnage du film, c’est le peu de moyens dont a disposé le cinéaste pour faire son film. C’est à mettre au crédit du film. Loin d’être un frein, ce manque de moyens permet au cinéaste de faire preuve d’une certaine inventivité. Je repense à la première rencontre. Il s’agit d’un plan fixe sur les chaussures des deux personnages. On voit ces chaussures se heurter, repartir dans la mauvaise direction, faire demi-tour, se reheurter. Le cinéaste géorgien fait preuve d’un certain sens du burlesque et du rythme.
Formellement, le réalisateur fait un choix assez radical. Un narrateur raconte cette histoire, comme si on lisait un bouquin. Le narrateur rapporte la plupart des propos des personnages. On a l’impression de voir un livre imagé, dont le narrateur tournerait les pages avec une main invisible et qu’il commenterait. On entend parfois parler les personnages secondaires (son patron à lui, sa colloc à elle). Mais les deux personnages principaux ne parlent quasiment jamais, renforçant l’idées de personnages envoûtés, comme anesthésiés par le sort.
Sur 1h30, j'aurais dit que le film est absolument charmant. Hélas, il en fait 2h30. Mon Dieu, que c’est interminable et lent! Sur la longue, j’ai trouvé ce procédé plombant et je suis totalement sorti de ce film qui me plaisait au premier abord. Le film charmant s’est transformé en monument d’ennui. J’aime beaucoup les films littéraires comme les films de Pascal Thomas ou le récent ‘Tromperie’ d’Arnaud Depleschin. Mais là, j’ai trouvé que la forme prenait trop le dessus sur le film et écrasait l’ensemble.
L’ennui que j’ai ressenti face à ce film est trop profond pour être oubliable car le film a énormément de qualités : un sens du burlesque, du rythme. Mais le résultat est franchement pénible.