Ulrich Seidl traine une sale réputation mais son cinéma m'intéresse, ou du moins, j'ai envie de m'intéresser à son cinéma, car son extrême noirceur n'est pour moi pas que du cynisme, je vois chez lui le désir de vraiment tenter de comprendre ses contemporains, et ce qu'il y a de plus sombre chez ses contemporains. Il n'est pas autrichien pour rien, et je vois en son cinéma, le désir d'artiste de prévenir de la montée du pire, comme un éternel recommencement. Oui, bien sûr, il le fait avec beaucoup de provocation, et pas toujours dans la dentelle, mais je trouve son geste d'une grande pertinence. Avec sa manière de toujours mêler la fiction au documentaire, sans qu'on ne sache jamais qui l'emporte sur qui, il décide ici de filmer les sous-sols des Autrichiens, ou plutôt les dérives que peuvent avoir les Autrichiens dans leurs caves. De toutes les scènes filmées, qui s'enchevêtrent les unes les autres, une seule est fictive (l'une des plus fortes) mais le cinéaste ne le dira jamais. Nous l'apprenons que par les bonus du film, ou les entretiens avec le cinéaste. Cela peut perturber, mais je l'accepte comme un postulat. Je ne vous dirai évidemment pas de laquelle il s'agit. Nous voyons alors des femmes, des hommes, des couples, au beau milieu de leur perversion, les pratiquant de la manière la plus libre qui soit, car ils sont cachés, à l'abri des regards. De celui qui possède un boa constrictor de plusieurs mètres aux nostalgiques du 3ème Reich, de la masochiste (dont on apprend vite qu'elle a tué son mari) au couple dominant / dominé (l'un des trucs les plus extrêmes du film, attention les yeux), il est intéressant de constater que quasiment tous les scènes ici filmées ont à voir avec le sexe, le pouvoir, la domination. Comment ne pas penser alors au destin de la jeune Autrichienne Natascha Kampusch, enlevée et séquestrée durant plus de 8 ans dans des circonstances atroces. C'est en cela où le cinéma de Seidl devient politique, car s'il n'évoque jamais cette jeune femme, son ombre est omniprésente.