L’histoire est centrée sur une citadine de 12 ans prénommée Anna. C’est une brune aux yeux bleus, plutôt mince qui ne semble pas très bien dans sa peau. On la voit au début dans un parc, à l’écart de ses camarades, avec des pensées un peu négatives. Elle évoque un cercle magique dont elle serait exclue, alors que ses camarades seraient à l’intérieur. Elle dessine sur un bloc-notes. Ce qu’elle fait est de qualité, mais elle n’est pas contente de son œuvre et n’ose pas la montrer. Finalement, à la suite d’un malaise, elle se retrouve à l’hôpital. Le médecin annonce à sa mère que, en raison de son asthme, il serait judicieux de l’envoyer à la campagne. Un peu désemparée mais désireuse d’agir pour le bien d’Anna, la mère l’envoie chez sa sœur, au Nord d’Hokkaïdo, où elle est parfaitement accueillie. Même si certains épisodes la mettent un peu mal à l’aise (et si elle se montre maladroite), la jeune asthmatique apprécie l’endroit et ne prête pas vraiment attention aux plaisanteries de son oncle qui la taquine à propos de fantômes.
Début un peu anodin ? En apparence seulement, car le scénario recèle déjà un certain nombre d’interrogations. Pourquoi Anna a-t-elle si peu confiance en elle ? Pourquoi parle-t-elle de sa tante et non de sa mère ?
A la campagne, Anna rencontre un homme qui pêche en solitaire. Un taiseux, un vrai, qui la ramène néanmoins un soir chez son oncle et sa tante. Alors qu’elle explorait une maison vide au bord du marais, Anna n’a pas vu le temps passer. Au moment de sortir, elle réalise que le niveau de l’eau est monté, rendant impraticable le chemin qu’elle avait emprunté pour venir. Dans la barque du barbu taiseux, elle voit (croit voir ?) de la lumière à une fenêtre de cette maison pourtant inhabitée. Derrière la fenêtre, une jeune fille blonde assise, se faisant coiffer ses longs cheveux par une vieille femme.
Anna fait la connaissance de la jeune blonde, avec qui elle devient naturellement amie. Elle réalise aussi que la maison qu’elle a visitée déserte est maintenant habitée. Notamment par une petite fille (brune à grosse lunettes, plus jeune et donc plus naïve qu’elle) qui tient dur comme fer à ce qu’elle soit Marnie. Curieuse fillette qui semble avoir des informations sur Marnie, alors que celle-ci disparait comme par enchantement dès que la petite est en compagnie d’Anna.
On peut s’interroger à propos du titre : de quels souvenirs est-il question ? Cela renvoie à Hitchcock parce que Marnie est une blonde aux yeux bleus. Le réalisateur fait également référence à Miyazaki, avec la femme qui peint du haut de la falaise comme le faisait la mignonne amoureuse de Jiro dans Le vent se lève (malade, un peu comme Anna). Puisque Hayao Miyazaki a annoncé sa retraite, les studios Ghibli pourront se consoler avec Hiromasa Yonebashi, réalisateur de ce beau Souvenirs de Marnie tout à fait dans l’esprit, le thème de l’amour filial étant ici traité de façon sensible et émouvante. Parmi les qualités du film, une BO agréable, pas mal de mystère, une touche de fantastique, une animation dans la tradition du studio (dessin d’une grande lisibilité, de belles couleurs) et un scénario intelligent (adapté d’un roman de Joan G. Robinson) où chaque personnage trouve sa place, scénario ménageant quelques surprises sans pour autant verser dans les longueurs inutiles. De quoi combler les attentes d’un large public, y compris relativement jeune.
Les nostalgiques de Miyazaki remarqueront que si la nature ici est à l’honneur, avec l’élément liquide et quelques plans sur des oiseaux, ce n’est qu’illustratif alors que le maître en faisait un thème militant. Le film est agréable et bien fait, mais n’échappe pas à certains clichés. On notera par exemple que Marnie a une trop forte tendance à la perfection, même si on comprend finalement qu’Anna a toutes les raisons de l’idéaliser.